Le Monde, France
To Oppose U.S. on Iran, France Attends to Putin

EDITORIAL

Translated By William Kern

September 24, 2006
France - Le Monde - Original Article (French)    



President Jacques Chirac pins a Rosette of the Legion of Honor on
Russian President Vladimir Putin, as part of the French President's
campaign to stay on the Russian leader's good side, and maintain a
strong block against the United States on Iran's nuclear program.

------------------------------------------------------------------------------

In the service of his economic strategy and his ambition to see Russian companies improve their position abroad, Vladimir Putin employs the same methods perfected since he first took power, and which account for much of his previous success within the KGB: dissimulation, intimidation and the struggle for power.

He didn't warn [French President] Jacques Chirac of his intention to initiate the attack on EADS [the European aerospace consortium] stock. Neither did he consult the Europeans before Russia's state-owned Gazprom, in true high-handed fashion, decided to cut gas supplies to Ukraine last January 1, which resulted in disturbances to Europe's energy supply. And similarly, Mr. Putin has committed himself to a gas consortium with Algeria, which could in the long term curtail Europe's capacity to diversify its supply, and will require the E.U. to engage in further dialogue with Mr. Putin.

[Editor's Note: Earlier this month, a Russian state-controlled bank bought a 5.02 percent stake in EADS, Europe's leading aerospace and defense group and parent company of Airbus. Russian officials indicated then that the government hoped to increase its stake.]

It was thus a Russian president on the offensive that Jacques Chirac welcomed on Saturday, September 23. The tripartite Franco-German-Russian meeting also took place with the presence of [German] Chancellor Angela Merkel. On the French side, everything possible has been done to blur the differences that the Kremlin chief might wish to employ in his desire to restore Russian power. Mr. Chirac sees Vladimir Putin's Russia as a friendly country, for which criticism must be curtailed. It is a question of believing in Putin's desire to play a constructive role in resolving a number of questions: the continent's energy security; the proximity of Europe to Ukraine and Belarus; the resolution of "cold conflicts" (Transnistria RealVideo; Abkhazia RealVideo, Ossetia RealVideo); and the status of Kosovo.



Putin, Merkel and Chirac: The face of Western opposition
to American plans to impose sanctions against Iran.


------------------------------------------------------------------------------

When meeting Mr. Putin, Jacques Chirac values the three-way France-Germany-Russia format. The grouping's highest level of cooperation came in 2003, when it acted as the "face of refusal" against launching the Iraq War. Angela Merkel has been the most reticent to take part. She questions the relevance and the impact of these meetings between "major" states, which relegates the remainder of the European Union to the sidelines. There has been little progress in formulating a coherent European policy that would help arrive at a mutually beneficial arrangement with Russia. And the lack of a more general Europe-wide energy policy has given Mr. Putin an opening to advance his pawns.

Now that the powerful Silvio Berlusconi and Gerhard Schroeder have left the scene, Jacques Chirac is the only European leader willing to shower the Russian president with attention. And ultimately, what drives this preoccupation is the need to maintain good cooperation with Moscow on Iran's nuclear file. Against the United States.

French Version Below

L'ami Poutine

24.09.06

Vladimir Poutine déploie, au service de sa stratégie économique et de son ambition de voir des groupes russes prendre des positions à l'étranger, les mêmes méthodes qu'il a peaufinées en Russie depuis son arrivée au pouvoir, et dans lesquelles son passé au sein du KGB compte pour une part non négligeable : la dissimulation, l'intimidation, le rapport de forces.

Il n'avait pas prévenu Jacques Chirac de son intention de partir à l'assaut d'une partie du capital d'EADS. Il n'avait pas, non plus, consulté les Européens lorsque, le 1er janvier, la société Gazprom, sur laquelle il a la haute main, avait décidé de couper le robinet du gaz à l'Ukraine, entraînant des perturbations dans les fournitures énergétiques de l'Europe. De même, M. Poutine s'est-il attelé à un projet de cartel gazier avec l'Algérie, qui pourrait à terme réduire la marge de manoeuvre des Européens dans la diversification de leurs fournitures, sans se préoccuper plus avant de dialogue.

C'est donc un président russe à l'offensive qu'accueille Jacques Chirac, samedi 23 septembre, à l'occasion d'un sommet tripartite franco-germano-russe, en présence de la chancelière Angela Merkel. Mais tout est fait, côté français, pour estomper les contrariétés que peuvent provoquer les appétits du chef du Kremlin dans son désir de restaurer la puissance russe. La Russie de Vladimir Poutine, dans la vision de M. Chirac, est un pays ami, auquel les critiques doivent être épargnées. Il s'agit de croire en sa volonté de jouer un rôle constructif dans la résolution de questions multiples : sécurité énergétique du continent, voisinage de l'Union européenne avec l'Ukraine, la Biélorussie, résolution des "conflits gelés" (Transnistrie, Abkhazie, Ossétie), statut du Kosovo.

Pour traiter avec M. Poutine, Jacques Chirac apprécie le format à trois, France-Allemagne-Russie, dont le temps fort a été le "front de refus" contre le déclenchement de la guerre en Irak, en 2003. Angela Merkel, elle, est plus réticente. La question de la pertinence, et de l'impact, de ces rencontres entre "grands" qui tiennent à l'écart le reste des pays de l'Union européenne peut être posée. La formulation d'une politique européenne cohérente et sereine, face à une Russie qui joue au donnant-donnant, n'y gagne pas toujours en clarté ni en efficacité. C'est l'absence de politique européenne énergétique forte qui a permis à M. Poutine d'avancer ses pions.

Depuis le départ du pouvoir de Silvio Berlusconi et de Gerhard Schröder, Jacques Chirac est le dernier dirigeant européen à continuer d'entourer le président russe de tant de prévenances. L'une de ses préoccupations, en toile de fond, est de maintenir une bonne coopération avec Moscou sur le dossier nucléaire iranien. Contre les Etats-Unis.

Article paru dans l'édition du 24.09.06