The Blindness of the West in the Face of Radical Islam

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L’aveuglement de l’Occident face à l’islamisme radical

Est-ce par aveuglement ou par duplicité que l’Occident ne cesse d’agir contre ses propres intérêts au Moyen-Orient, et détruit un à un tous les remparts contre l’extrémisme islamique? Marie-Hélène Miauton

Quel incroyable aveuglement conduit l’Europe et les Etats-Unis à promouvoir, depuis plus de trente ans, l’avènement d’un Islam radical au Moyen-Orient sous couvert de lutter contre des dictateurs qui, pourtant, lui faisaient rempart.

Cela a commencé lorsque nous avons abandonné le Shah d’Iran alors qu’il s’efforçait de réformer le pays et qu’il était contesté par les mollahs, fâchés qu’il ait privé le clergé de ses terres et qu’il ait donné le droit de vote aux femmes. Aidé par les mouvements estudiantins iraniens du parti communiste et de l’extrême gauche, Khomeiny reçut le soutien inconditionnel d’un Jean-Paul Sartre ou d’un Michel Foucault alors qu’il avait trouvé asile en France. L’ayatollah prit donc le pouvoir en 1979 pour dix longues années, réprimant ses opposants à l’identique du régime antérieur, mais ramenant son pays à l’obscurantisme en lui imposant la charia. Ainsi, la bienveillance de l’Occident permit l’instauration d’une république islamique là où régnait une politique pro-occidentale.

Puis, ce fut la première guerre d’Irak dont les causes étaient aussi spécieuses que celles qui conduisirent à la seconde. Pour défendre leurs seuls intérêts, et alors qu’ils avaient soutenu Saddam Hussein pendant huit ans, les Etats-Unis entamèrent une guerre dont les effets dévastateurs furent considérables. Puis, ce fut leur deuxième intervention qui, succédant à un embargo de dix ans, fit là-bas plus de morts civiles que le terrorisme n’en produira jamais ici. Ce faisant, l’Occident démit un dictateur laïc pro-occidental pour installer un chaos meurtrier et donner naissance à l’Etat islamique.

Ensuite, comme si nous n’avions pas compris la leçon, il a fallu que nous aidions au renversement de Kadhafi. En 2011, sous l’influence du ridicule BHL, Paris reconnut le chef de l’insurrection comme seul représentant du pays puis, sur ordre du Qatar et de l’Arabie saoudite, les alliés occidentaux entreprirent de mettre de l’ordre en Libye. On sait désormais que Paris serait allé jusqu’à financer la rébellion en échange de futurs contrats et à lui fournir des armes. Actuellement, le pays est déchiré entre l’officiel gouvernement de Tobrouk et son concurrent de Tripoli, soutenu par les Frères musulmans du Qatar et de la Turquie. Mais interviennent aussi des groupes djihadistes proches d’Al-Qaïda, des milices tribales incontrôlées et enfin la branche libyenne de l’EI. Tout ce beau monde nous envoie des milliers de migrants par bateau tandis que les populations locales souffrent. Ce désordre sert évidemment l’implantation de l’EI.

Aujourd’hui, comme si nous ne nous étions pas suffisamment trompés de cible auparavant, nous voulons l’éviction de l’infréquentable (un de plus) chef d’Etat syrien en postulant que les rebelles qui s’y opposent sont des «modérés». Nous boudons notre appui au général égyptien al-Sissi qui a l’impudence de vouloir lutter contre les Frères musulmans et de rétablir un peu d’ordre. Nous conspuons Poutine qui les soutient et devient ipso facto l’ennemi no 1 d’une Turquie, membre de l’OTAN, dont les agissements pervers devraient susciter de notre part des représailles musclées. Une fois encore, nous prétendons détenir la vérité alors que nous travaillons contre nos propres intérêts géostratégiques.

Serait-ce un réflexe pavlovien de la vieille Europe qui l’amènerait, chaque fois qu’il s’agit de destituer un régime autoritaire, à aider les insurgés au nom de la démocratie, comme si de la révolution ne pouvaient surgir que des bienfaits? Serait-ce de la part des Etats-Unis une façon de semer le trouble aux marges d’une UE qui pourrait lui disputer sa suprématie économique? Serait-ce une forme de syndrome de Stockholm ou une manifestation de dégénérescence chez des peuples lassés de vivre? Serait-ce tout simplement la conséquence des calculs erronés de gouvernements peu éclairés?

Zeus rend fous ceux qu’il veut perdre, disaient déjà les Grecs.

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