Donald Trump Is Determined To Close America to Muslims

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Donald Trump bien décidé à fermer l’Amérique aux musulmans

La déclaration du milliardaire, lundi, a été violemment critiquée, y compris chez les républicains. Mais jusqu’à maintenant, ses dérapages ont toujours conforté son avance.

Le contraste est saisissant. Et illustre la polarisation croissante de la société américaine. Dimanche soir, lors d’une allocution solennelle après l’attaque terroriste de San Bernardino, Barack Obama avait appelé à rejeter toute discrimination envers la communauté musulmane. «Notre nation a été fondée sur la conviction que peu importe qui vous êtes, d’où vous venez, à quoi vous ressemblez ou quelle religion vous pratiquez, vous êtes égaux devant Dieu et aux yeux de la loi», avait insisté le président américain.

«Déséquilibré».

Le lendemain, Donald Trump, candidat à l’investiture républicaine pour la présidentielle de 2016, proposait la «fermeture totale» des Etats-Unis à tous les musulmans. Nombre d’entre eux étant, selon lui, animés d’une «haine» envers l’Amérique. «Nous devons déterminer d’où vient cette haine et pourquoi elle existe. Jusqu’à ce que nous soyons en mesure de comprendre ce problème et la dangereuse menace qu’il représente, notre pays ne peut être victime d’horribles attaques par des gens qui ne croient qu’au jihad», assénait le magnat de l’immobilier dans un communiqué. Après les attentats du 13 Novembre, il avait déjà proposé de ficher tous les musulmans vivant aux Etats-Unis et d’«éliminer toutes les familles» des jihadistes.

«Irresponsable», «scandaleux», «raciste», «insensé» : la proposition de Trump, qui violerait à coup sûr la Constitution américaine, a suscité une pluie de condamnations à droite comme à gauche. La Maison Blanche a estimé que Trump s’était «disqualifié» pour la présidence des Etats-Unis. «C’est moralement répréhensible et cela a des conséquences pour notre sécurité nationale», a dit Josh Earnest, porte-parole d’Obama. «Donald Trump est déséquilibré», a tweeté Jeb Bush, lui aussi candidat à la primaire républicaine. Même le très conservateur ancien vice-président Dick Cheney a dénoncé une idée allant «à l’encontre de tout ce que nous défendons et de tout ce en quoi nous croyons».

Donald Trump est-il allé trop loin, s’interrogent en chœur la presse et les commentateurs ? Cette énième provocation sera-t-elle celle de trop, celle qui précipitera – enfin – la chute du «Donald», en tête des sondages depuis cinq mois ? A en croire la première réaction de ses partisans, rien n’est moins sûr. En meeting lundi soir en Caroline du Sud, le milliardaire a vu sa proposition saluée par une standing ovation. «Renvoyez-les chez eux !» ont crié certains supporteurs, en référence aux musulmans américains. Et lorsqu’un manifestant a dénoncé une initiative «raciste», il s’est fait copieusement huer avant d’être expulsé par le service d’ordre.

«Trump est le maître pour canaliser les pires pulsions et les plus grandes peurs de nombreux Américains. Il le fait principalement en diabolisant tous ceux qui ne lui ressemblent pas : les musulmans, les Latinos, les Noirs et même les femmes», dénonce USA Today dans un éditorial cinglant, où le milliardaire est qualifié de «marchand de peurs en chef». Face à l’anxiété suscitée par les attentats de Paris et de San Bernardino, Trump joue aux pompiers pyromanes. Quand Obama appelle à «ne pas céder à la peur», le magnat de l’immobilier, lui, attise à dessein les angoisses.

En guerre contre les musulmans, Donald Trump l’est aussi contre Obama, dont il ne cesse de dénoncer la faiblesse et la naïveté. Au sein de l’électorat républicain, et particulièrement chez les sympathisants de Trump, la haine du président démocrate est un puissant moteur. «L’aspect principal de la primaire républicaine est le désir des électeurs d’avoir un leader fort. Le prochain président est presque toujours une réaction au précédent, explique à Politico le stratège républicain Steve Schmidt. Quand les électeurs républicains regardent Obama, ils voient de la faiblesse, de l’incompétence et de l’indécision. Et Trump, de leur point de vue, est l’antidote à cela.»

«Coup brillant».

Et si se mettre à dos tous les responsables politiques américains, démocrates comme républicains, était l’effet recherché ? s’interroge Erick Erickson, rédacteur en chef du site ultraconservateur Red State ? «C’est un coup politique brillant», écrit ce dernier, estimant qu’avec cette polémique, Trump renforce son statut de candidat antisystème.

A moins de deux mois du début des primaires, les candidats républicains n’en finissent plus de s’interroger : comment détrôner Donald Trump, qui plane toujours à 30 % des intentions de vote, loin devant ses concurrents ? La tâche est d’autant plus ardue que le milliardaire passe son temps à caricaturer la réalité, voire à mentir de manière éhontée. «Donald Trump utilise la rhétorique pour saper la confiance des gens dans les faits, les nombres, les nuances et les médias», écrivait récemment le New York Times. Pour justifier la fermeture des frontières aux musulmans, Trump a ainsi cité un douteux «sondage» affirmant que 25 % des musulmans sont d’accord avec l’idée que la violence contre les Américains est justifiée. Un sondage réalisé par le Center for Security Policy, connu pour ses positions islamophobes.

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