May the Force Be with Her

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Cela fait des années qu’on l’attend. Le suspense n’a cessé de monter à coups de bandes-annonces et de teasers savamment distillés. On connaît l’essentiel du scénario et les principaux protagonistes mais, ce mercredi, c’est le grand jour. La sortie du nouveau « Star Wars » ? Non. La réunion du comité de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine ! Une réunion pour l’histoire qui devrait acter le premier relèvement des taux d’intérêt depuis… 2006.

Pour l’Amérique, c’est un événement majeur. Le signe que la première économie mondiale est repartie sur de bonnes bases, sept ans après le traumatisme de la faillite de Lehman Brothers. Pendant sept ans, ses présidents Ben Bernanke et Janet Yellen ont employé toutes les armes imaginables pour repousser le spectre de la Grande Dépression et les forces de la déflation. Une politique de taux zéro que nul n’imaginait durer aussi longtemps, des mesures exceptionnelles pour soutenir les banques de Wall Street, trois épisodes massifs de « quantitative easing » – la planche à billets dans le jargon des argentiers. Les résultats sont là. La croissance américaine est repartie à un rythme de 2 à 3 %, le pays est proche du plein-emploi. Le temps est venu pour la banque centrale de déposer les armes, de revenir « à la normale » et d’entamer un cycle de resserrement monétaire. Cela fait des mois que ses membres soupèsent les arguments pour et contre, des mois qu’ils tentent d’habituer les investisseurs à ce changement de cap. Jamais une décision n’aura été aussi minutieusement préparée.

Pourtant, au moment d’agir, Janet Yellen aura sans doute en tête les risques qu’implique une telle décision. Risques de casser une reprise que certains jugent encore trop fragile, au moment où la Chine et les pays émergents montrent des signes de faiblesse. Risques de provoquer de nouvelles secousses sur les marchés, notamment les marchés de dette dopés aux liquidités abondantes. Risques d’enclencher une nouvelle guerre des changes. Car, quand la Fed se réveille, c’est l’ensemble de la galaxie financière qui est en émoi.

Yellen, pourtant, ne doit pas trembler. Si elle n’agit pas maintenant, elle se privera de marges de manoeuvre futures en cas de rechute de l’économie américaine. Elle prendra le risque de courir après l’inflation si les pressions salariales devaient accélérer dans les mois à venir. Elle achèvera de brouiller les repères des investisseurs, gonflant un peu plus des bulles financières qui ne demandent qu’à éclater. Janet Yellen ne peut plus reculer devant l’obstacle. Elle doit relever ses taux et préparer, prudemment, le terrain à de nouveaux gestes l’an prochain. Que la force soit avec elle !

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