Has the Cold War 2.0 Begun?

<--

La guerre froide 2.0 a-t-elle commencé?

Trump contre Poutine sur la question de l’armement nucléaire. Fidèle à lui-même, le président désigné des États-Unis y va de déclarations d’une grande irresponsabilité (« Une course aux armements, s’il le faut »). Une irresponsabilité qui, au reste, sert bien les intérêts de Vladimir Poutine.

L’histoire officielle américaine a tendance à encenser l’ex-président Ronald Reagan pour son rôle dans l’effondrement de l’Union soviétique. Qui pourtant avait 20 ans au début des années 1980 se souvient du climat de psychose collective dans lequel se trouvait le monde à l’époque. Les relations Est-Ouest étaient à ce point tendues que l’escalade verbale entre Washington et Moscou faisait redouter le déclenchement d’un affrontement qui risquait de déboucher sur une conflagration nucléaire.

Encenser M. Reagan, c’est au demeurant oublier un peu vite les réformes démocratiques entamées en 1985 par le président d’alors, Mikhaïl Gorbatchev, dont c’est d’ailleurs ce dimanche le 25e anniversaire de la démission, survenue le 25 décembre 1991.

Donald Trump est-il en train de reconvoquer ces liaisons dangereuses avec la Russie — pendant que les tensions montent par ailleurs avec la Chine ? Il jette en tout cas de l’huile sur le feu en twittant d’abord que les États-Unis avaient besoin « de renforcer et de développer » leurs armes nucléaires, puis en affirmant vendredi matin à un animateur de la chaîne d’information MSNBC depuis sa résidence en Floride, avant d’aller jouer au golf avec Tiger Woods. : « Nous aurons une course aux armements, s’il le faut. Nous les dépasserons à chaque étape et nous leur survivrons. »

Son entourage est vite intervenu pour tenter d’édulcorer ses propos, comme il l’avait fait mercredi quand M. Trump a semblé dire, puisque ses propos sont souvent aussi vociférants qu’imprécis, que le récent attentat terroriste commis à Berlin justifiait sa promesse de campagne de fermer aux musulmans les portes des États-Unis. N’empêche que ce qui est dit est dit.

Évidemment, la nouvelle guerre froide qui se dessine est une dynamique apparue avant l’élection de Trump et autour de laquelle on s’interroge en Europe depuis un certain temps. C’est une « guerre froide 2.0 », ainsi que l’appelait The Guardian dans un récent papier, qui marque en fait la fin de 20 ans d’autosatisfaction occidentale.

En visite à Berlin en 2014 à l’occasion du 25e anniversaire de la chute du mur, M. Gorbatchev avait d’ailleurs annoncé la résurgence du vieux conflit historique, pour cause immédiate de crise ukrainienne. Plus fondamentalement : si l’Ouest avait traité la Russie avec moins d’arrogance dans la foulée de la chute du régime communiste, avait fait valoir le père de la perestroïka, les relations russo-occidentales n’en seraient sans doute pas là aujourd’hui — et le nationalisme agressif de M. Poutine ne se serait pas disséminé avec autant de facilité.

Pendant presque toute sa présidence, Barack Obama aura affiché cette même superbe, considérant Moscou comme un rival qui n’était pas de taille et qui cherchait à compenser sa faiblesse avec des élans de bravade militaire. Plus récemment, la Maison-Blanche a commencé à ajuster son discours à la réalité en affirmant que Moscou, surutilisant ses ressources, allait s’enfoncer dans le « bourbier » syrien.

Le fait est que, l’année 2016 s’achevant, Vladimir Poutine est en fort bonne posture, malgré l’état déficient de l’économie russe. À l’intérieur, faisant le vide de l’opposition autour de lui, il applique son projet autoritaire en surfant sur une opinion publique qui vit dans une certaine nostalgie de la grandeur de l’URSS — puisque la nostalgie est une faculté capable de trier les souvenirs. À l’extérieur, la Russie est devenue au Proche-Orient un rival stratégique incontournable.

M. Poutine a fait maintes fois des déclarations sur la nécessité de renforcer le potentiel militaire russe. Celle à laquelle M. Trump a réagi n’était pas la première. Il se trouve que la Russie comme les États-Unis, qui possèdent quelque 7000 têtes nucléaires chacun, sont présentement lancés dans des dépenses de modernisation de leur arsenal.

Le contexte fait qu’on peut facilement imaginer que M. Poutine se fera un plaisir, au cours des prochaines années, de rivaliser de virilité avec M. Trump. On ne demande qu’à se tromper, sachant que l’utilisation d’un seul engin nucléaire suffirait à provoquer une catastrophe économique, environnementale et pour l’humanité.

About this publication