A Middle East Stripped of Its Frills

<--

Un Proche-Orient sans oripeaux

ÉDITORIAL. Le «deal du siècle» dévoilé par Donald Trump a le mérite de la clarté. Il offre la Palestine au vainqueur israélien

A la bonne heure! Après trois ans d’attente, Donald Trump a finalement dévoilé son «deal du siècle», supposé régler une fois pour toutes la question israélo-palestinienne. Ce plan est un scandale, une farce et une insulte à la raison. Mais il aurait aussi un bon côté s’il venait à être réellement appliqué: il clarifierait enfin la situation au Proche-Orient, après plus d’un demi-siècle d’enfumage et de faux-semblants.

Ce «plan du siècle», dont la paternité revient au gendre du président américain, Jared Kushner, a un premier objectif évident: il s’agit de se donner un coup de pouce mutuel entre deux amis, Donald Trump et Benyamin Netanyahou, qui ont étroitement associé leurs destins politiques. En pleine procédure de destitution pour le premier, talonné par la justice de son pays pour le second, les deux hommes accomplissent ainsi un exercice d’autopromotion à moindres frais (pensent-ils). Pour Trump, chaque coup joué en faveur d’Israël est gagnant, auprès de sa base électorale évangélique. Quant à Netanyahou, être épaulé par la puissance américaine, c’est toujours bon à prendre, à quelques semaines des prochaines élections israéliennes.

Mais le plan américain va bien au-delà de cet arrangement entre amis. De manière frontale et décomplexée, il s’agit aujourd’hui de rafler la mise dans les territoires palestiniens. Ainsi, l’enjeu n’est pas tant de trouver une «paix» pour la région que de tirer parti de cinquante ans de politique de «faits accomplis» menée avec une constance inaltérable sur le dos des Palestiniens. Une annexion des colonies israéliennes, de la vallée du Jourdain, voire du gros de la Cisjordanie? Comme il siéra désormais au vainqueur israélien.

Car le «deal du siècle» est, pratiquement, une affaire purement israélo-israélienne. Au mieux, il servira à arbitrer les appétits des différentes factions de la droite et d’une extrême droite qui, comme il se doit, en réclame encore davantage. La Palestine est à prendre, dit ce plan, même s’il faut encore s’entendre sur les détails. Au passage, voilà Netanyahou – et ses méthodes – replacé au centre de l’échiquier politique.

Ce «deal» a donc du bon, pour autant qu’il soit suivi d’effets. Au débarras l’incantation des «deux Etats vivant côte à côte»; aux oubliettes une Autorité palestinienne qui ne sert plus à rien depuis des décennies… Dévêtue de ses oripeaux, la situation peut en effet apparaître pour ce qu’elle est réellement: une population palestinienne «annexée», de fait, depuis longtemps et qui, faute de souveraineté, doit aujourd’hui s’employer à réclamer des droits similaires à ceux des Israéliens.

About this publication