Hillary by Default?

 

 

 

 

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Le GOP « sombre dans l’anarchie », titrait lundi The Washington Post. Ce dont Donald Trump n’a cure, étrangement, tant il continue de se plaire dans son rôle de chien dans un jeu de quilles. Les républicains s’entre-déchirant, Hillary Clinton deviendra présidente par défaut si la tendance se maintient.

Paul Ryan, influent chef de file de la majorité républicaine à la Chambre des représentants, n’est pas allé jusqu’à reconnaître publiquement avoir fait une croix sur la présidence, mais c’est tout comme. Lâchant M. Trump à quatre semaines de l’élection présidentielle du 8 novembre, il s’agit maintenant pour une grande partie de l’establishment républicain de sauver les meubles — lire de préserver les majorités dont disposent les républicains à la Chambre des représentants et au Sénat.

Car dans l’ordre actuel des choses, non seulement les démocrates sont-ils autorisés par les derniers sondages à penser que Mme Clinton s’achemine vers une victoire écrasante à la présidentielle, mais qu’il est aussi envisageable qu’ils puissent s’emparer de la majorité des sièges dans les deux chambres du Congrès. Changement radical par rapport à il y a quelques semaines, alors que les sondages mettaient Mme Clinton et M. Trump à égalité dans les intentions de vote.

À campagne tout à fait hors-norme, remous électoraux imprévisibles. Ce qui explique sans doute en partie que M. Trump joue son va-tout et s’en tienne obstinément à la « stratégie » ultrapopuliste qui l’a mené là où il se trouve aujourd’hui.

Un sondage NBC/WSJ le place loin derrière sa rivale après la diffusion de la vidéo dans laquelle il tient des propos obscènes ? Qu’à cela ne tienne. Tout politicien normalement constitué, ce qu’il n’est pas, s’emploierait à cette heure tardive de la course à tenter d’élargir ses appuis puisqu’il est mathématiquement entendu que l’homme ne dispose pas des intentions de vote nécessaires, y compris au sein de l’électorat républicain, pour remporter la présidence. Si bien qu’à moins d’être politiquement suicidaire, M. Trump croit de toute évidence pouvoir faire l’économie du soutien les bonzes du parti — ou peut-être même tirer profit de la « guerre civile » qui a éclaté à l’intérieur du GOP ; et fantasme que le 8 novembre venu, il bénéficiera d’une gigantesque prime à l’urne provenant de démocrates tout aussi incapables de voter pour Mme Clinton que d’admettre ouvertement qu’ils ont voté pour lui…

Au-delà, la candidature de M. Trump étale les dérives et les hypocrisies de la classe politique dans son ensemble. Aussi, une bonne partie des Américains qui l’apprécient lui savent tout simplement gré de dire ce qu’il pense, sans filtres et sans manipulations. Ce qui soulève bien sûr toutes sortes d’autres questions préoccupantes, vu les préjugés et les insultes qui meublent sa « sincérité ».

On ne peut malheureusement pas dire que Mme Clinton a pris acte de la profonde fatigue collective vis-à-vis de tous ces politiciens qui racontent tout et son contraire. Et qu’elle veuille vraiment y remédier. À lire les extraits de discours (révélés par WikiLeaks) qu’elle a prononcés ces dernières années devant les milieux d’affaires de Wall Street, il en ressort assez clairement que ses sensibilités progressistes pour les moins nantis et la « classe moyenne » sont en fait très relatives et qu’elle se sera surtout employée en campagne électorale à les cultiver dans le but de faire échec à la candidature de Bernie Sanders.

De quoi donc sera faite, dans ce contexte, la présidence de Mme Clinton si elle est élue ? On imagine que les Donald Trump de ce monde, profitant du cynisme ambiant, continueront de faire recette.

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