Voilà un témoin clé dans les audiences publiques menées dans le cadre de l’enquête sur sa destitution que Donald Trump ne va pas pouvoir accuser gratuitement de mesquinerie et de parti pris pour les démocrates.
C’est que Gordon Sondland, ambassadeur des États-Unis auprès de l’Union européenne, est loin d’être un « Never Trumper », comme le président américain aime réduire ses opposants politiques. Mercredi, les élus américains vont plutôt faire face à un républicain de longue date qui s’est placé derrière Trump lors des primaires de 2016 et qui n’a pas hésité à verser un million de dollars lors de la cérémonie d’investiture du président en janvier 2017.
Cette contribution lui a d’ailleurs valu ce poste de diplomate qui le place désormais au coeur de l’enquête historique en cours cherchant à savoir si l’occupant de la Maison-Blanche a abusé de son pouvoir pour obtenir de l’Ukraine des informations pour mieux compromettre son opposant politique Joe Biden.
À 62 ans, Gordon Sondland ne manque pas de points communs avec Donald Trump, pour avoir, comme l’improbable président américain, fait fortune dans le monde de l’hôtellerie, tout en frayant avec le monde de la politique.
Il maîtrise aussi l’art du mensonge et de la manipulation de réalité — ou de la complaisance : en octobre dernier, dans un témoignage sous serment et à huis clos, cet autre milliardaire américain, a prétendu en effet ne jamais avoir été impliqué dans les discussions visant à rendre conditionnelle l’aide militaire des États-Unis à l’Ukraine à une enquête de ce pays sur les Biden, père et fils. Il qualifiait même cette mécanique d’« illégale », particulièrement si le but était d’influencer la prochaine élection américaine.
Mais quelques jours plus tard, dans une lettre de trois pages adressée aux membres du comité de la Chambre des représentants qui l’avaient entendu, l’ex-dirigeant de Provenance Hotels, groupe aujourd’hui dans les mains de sa femme, Katherine Durant, est finalement revenu sur son témoignage, après qu’un nombre un peu trop important d’autres témoins eut fait converger vers les élus américains des versions contradictoires.
« Je me souviens maintenant d’avoir eu une discussion en tête à tête avec M. Yermak [un conseiller du président ukrainien, Volodymyr Zelensky], pendant laquelle je lui ai dit que le versement de l’aide américaine ne serait sans doute pas débloqué tant que l’Ukraine ne ferait pas la déclaration publique contre la corruption dont nous discutions depuis plusieurs semaines », a-t-il écrit.
Gêne et inconfort
Depuis le début des audiences publiques dans l’enquête en destitution de Donald Trump, Gordon Sondland est le seul diplomate américain à avoir été en contact direct avec le président américain dans l’affaire ukrainienne.
Les proches du président, comme l’avocat personnel de Trump, Rudy Giuliani, autre acteur clé de la manoeuvre d’intimidation, ayant refusé de se présenter à Washington sous les pressions, entre autres, de la Maison-Blanche.
La semaine dernière, William Taylor, chargé d’affaires à l’ambassade de Kiev au moment des faits, a relaté la confidence d’un membre de son équipe qui aurait été témoin d’un appel téléphonique en juillet dernier entre Gordon Sondlan et l’ex-figure de la téléréalité américaine.
Sur les enquêtes réclamées à l’Ukraine, l’ambassadeur auprès de l’Union européenne aurait indiqué que Zelensky faisait tout ce que la Maison-Blanche réclamait, mais aussi que Trump se préoccupait plus du sort de ces enquêtes que de celui de ce pays d’Europe dont l’intégrité est menacée depuis 2014 par un mouvement séparatiste pro-Russes à l’est.
L’implication de ce diplomate dans les discussions entre les États-Unis et l’Ukraine ont d’ailleurs semé la gêne et l’inconfort au sein du département d’État, a souligné M. Taylor, en raison d’une réalité géographique et géopolitique que le président américain visiblement ne maîtrise pas : l’Ukraine n’est pas un pays membre de l’Union européenne.
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