Les deux premiers mois de l’année 2008 ont été catastrophiques pour le secteur de l’emploi américain qui connaît, en ce début d’année, une période de vaches maigres. En effet, après avoir répertorié 22 mille employés licenciés en janvier, le Département du Travail américain a enregistré 63 mille révocations en février. Soit le niveau le plus important atteint par ce secteur depuis 2003.
Coincidant avec les craintes d’une récession économique qui menacent la première économie mondiale, cette contraction de l’emploi est d’autant plus inquiétante que ses effets vont au-delà des frontières américaines. Ajoutez à cela la crise énergétique et les problèmes du logement survenus après l’effondrement du marché des ”subprime”. Cet ensemble forme un cocktail nocif pour la santé économique mondiale confrontée à un problème généralisé de rareté des produits alimentaires causé par une demande importante venant des puissances émergeantes, notamment la Chine et l’Inde.
Les petites économies, parmi lesquelles Haïti, sont les plus touchées par ce phénomène dont les effets sont très perceptibles même dans la communauté floridienne des Etats-Unis d’Amérique où le chômage et la cherté de la vie constituent le lot quotidien des immigrants. Avec le ralentissement qui caractérise l’économie américaine actuelle, tous les prétextes sont bons pour les employeurs quand il s’agit de mettre sur le pavé un employé.
Une sentence qui s’apparente de plus en plus à la guillotine quand on sait que selon une étude sur l’indice mesurant la confiance des consommateurs, 25,1% des ménages jugent difficile de trouver du travail en mars aux Etats Unis.
Roro, un jeune immigrant haïtien dans la trentaine l’a appris à ses dépens. De retour à Miami au début du mois de mars après une visite de quinze jours en Haïti où il était venu voir ses parents, il a été licencié d’une entreprise où il travaillait depuis des années. Sous prétexte qu’il n’avait pas motivé son absence avant de partir.
Trois semaines après son licenciement, Roro est toujours sans emploi, malgré de multiples démarches pour trouver un autre débouché. Entre-temps, cet originaire d’Haïti éprouve toutes les peines du monde à joindre les deux bouts, payer ses redevances, continuer à suivre ses cours et entretenir sa personne. « C’est très difficile de trouver un job sûr de nos jours. Si cela continue ainsi, d’ici la semaine prochaine je dois remettre les clés de mon appartement», confie tristement le concerné. Continuer >
Le chômage est tellement visible dans la région de la Floride qu’il anime quasiment toutes les conversations. Pendant un séjour de deux semaines là-bas, au cours du mois de mars, j’ai en ai profité pour rendre visite à un ami que j’ai perdu de vue depuis 10 ans. L’accueil était des plus chaleureux, pourtant tout au long de notre conversation, mon hôte, d’un air gêné, n’a pas cessé de me répéter: «Ce n’est de cette façon que je voulais fêter nos retrouvailles. Tu es arrivé au mauvais moment. J’ai perdu mon travail en novembre dernier. Depuis lors, je me contente de petits boulots par-ci et par-là pour pouvoir tenir».
Ca gaze pour l’essence
De son côté, le baril de pétrole, allant de record en record, continue de tenir la dragée haute aux consommateurs américains. Ces derniers doivent chaque jour tirer plus d’argent dans leur tirelire pour payer la même quantité de carburant. De janvier 2007 à janvier 2008, le prix du brut a plus que doublé sur le marché mondial.
Dérice Estainfil, 46 ans, réside aux Etats-Unis depuis 1992. Chauffeur de profession, il assure depuis une dizaine d’année, le transport de passagers de Miami à Orlando. « Il y a cinq ans de cela, 60 dollars me suffisaient amplement pour faire le plein de mon mini-bus. Aujourd’hui, mon véhicule n’a pas changé, seulement pour le remplir il me faut près de 150 dollars », raconte cet originaire du Cap-Haïtien.
« Aujourd’hui, il nous faut plus d’argent pour avoir la même chose qu’on a acheté hier. On aura beau changer de gouvernement et de régime, ce problème existera toujours. Car, c’est la prophétie qui s’accomplit », argue Dérice Estainfil.
La hausse exponentielle du prix de l’essence sur le marché américain a, d’une part, influé sur l’augmentation du coût de la vie. En témoigne le constat du Département du travail américain à propos de l’inflation américaine en février :”En ne tenant pas compte des aliments et de l’énergie, la hausse mensuelle est de 0,5 pour cent, soit la plus importante augmentation de l’inflation de base depuis celle de 0,9 pour cent enregistrée en novembre 2006”.
Cette flambée du pétrole a, d’autre part, poussé certains employeurs à réduire leur personnel pour amortir leur dépense d’énergie.
Maguy, 40 ans, mère de deux enfants, est arrivée à Orlando (Etats-Unis) en juin dernier en provenance d’Haïti. Elle a déjà passé une dizaine d’entrevues d’embauche. A chaque fois, les responsables lui signalent qu’on fera appel à lui au moment opportun. Les jours et les mois passent, elle, comme bien d’autres dans son cas, est encore là à attendre.
Ces cas se comptent par centaines dans la communauté haïtienne aux Etats-Unis. Quand on connaît l’apport de la diaspora nord américaine dans l’équilibre de l’économie nationale, la crise de l’emploi qui sévit chez le grand voisin du Nord est très mal venue. Elle contribue à rendre encore plus complexe la cherté de la vie qui n’est pas une expérience essentiellement haïtienne.
« Si vous voyez que votre facture d’épicerie montent, vous n’êtes pas seul. Des fermiers de subsistance mangeant du riz en Equateur, aux gourmets se régalant d’escargots en France, les consommateurs du monde entier font face à la hausse des prix des denrées alimentaires », a souligné l’Associated Press dans un récent article qui fait ressortir l’ampleur de la hausse des prix des produits alimentaires, comme un phénomène mondial.
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