U.S. Federal Reserve Incompetence

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Un aveu d’impuissance de la Réserve fédérale américaine

La réserve fédérale américaine (Fed) a-t-elle changé de politique monétaire et de stratégie ?

La question secoue les marchés financiers et perturbe les analystes depuis deux semaines.

La banque centrale américaine a deux objectifs définis par la loi : la stabilité des prix et le plein-emploi. Elle a, depuis l’été 2007 et le déclenchement de la crise financière, délibérément sacrifié le premier, la lutte contre l’inflation, au bénéfice du second, soutenir l’activité à tout prix. La priorité de Ben Bernanke, le président de la Fed, est d’éviter une récession profonde aux Etats-Unis liée à l’effondrement du système bancaire et de financement de l’économie.

Après avoir semblé plus orthodoxe que son prédécesseur – Alan Greenspan, aujourd’hui décrié après avoir été encensé -, M. Bernanke a finalement agi, comme lui, sous la menace et la pression. En dix-neuf ans de présidence, M. Greenspan a affronté plusieurs récessions et éclatements de bulles spéculatives et, à chaque fois, ouvert en grand les vannes monétaires pour les surmonter.

Dans cette logique, la Fed a diminué le loyer de l’argent au jour le jour de 2,25 % entre janvier et avril, le rythme de baisse le plus rapide depuis vingt ans, et s’est portée, sous son autre casquette de régulateur du système bancaire, au secours de la banque Bear Stearns menacée de faillite, allant même jusqu’à financer sa reprise par JP Morgan Chase.

Mais depuis deux semaines, M. Bernanke, et plusieurs membres importants du comité de politique monétaire de la Réserve fédérale, notamment Jeffrey Lacker de la Fed de Richmond (Virginie) et Richard Fisher de celle de Dallas (Texas), ont changé de ton. M. Bernanke a prévenu le 9 juin, lors d’une conférence, qu’il “résisterait avec force à l’érosion des prévisions d’inflation à long terme”. MM. Lacker et Fisher ont mis en avant les dangers d’une spirale inflationniste. Cette détermination affichée dans la lutte contre l’inflation rappelle un peu celle de Paul Volcker – ex-président de la Fed qui s’est illustré dans les années 1980 en mettant fin à la spirale inflationniste par une politique monétaire vigoureuse. Les marchés en sont venus à parier sur une remontée du loyer de l’argent aux Etats-Unis, non pas lors du prochain comité de politique monétaire (23 et 24 juin), mais à l’occasion de ceux du 5 août ou du 16 septembre. Cela semble pourtant difficile à imaginer.

REVIGORER LE BILLET VERT

D’abord, parce que le risque de récession aux Etats-Unis n’a pas disparu et que, dans son histoire, la Fed n’a jamais commencé à resserrer le crédit avant que le taux de chômage commence à fléchir. Or, les fondamentaux de l’économie américaine sont toujours aussi mauvais. Les prix des logements continuent à baisser ; le taux de chômage augmente ; l’investissement ralentit ; la confiance des chefs d’entreprise est en recul ; l’industrie automobile s’effondre ; les Etats et les collectivités locales réduisent leurs dépenses ; la distribution de crédit ne cesse de diminuer ; enfin, les effets positifs sur le pouvoir d’achat des ménages et la consommation des baisses d’impôts devraient commencer à s’estomper dans les prochains mois.

En fait, le nouveau discours de la Fed a toujours le même objectif : éviter une profonde récession. Il s’attaque à la plus grande menace immédiate pour l’activité économique aux Etats-Unis, plus grande que le credit crunch (raréfaction du crédit) : l’envolée des prix du pétrole.

Redonner un peu de vigueur au dollar, en s’inquiétant de sa faiblesse comme l’a fait de façon inhabituelle M. Bernanke, il y a trois semaines, ou laisser entendre que la Fed pourrait relever ses taux, est à peu près le seul moyen dont dispose cette dernière pour peser sur les cours du baril. Une étude réalisée par la Fed de Dallas montre qu’il existe une corrélation assez étroite entre la hausse du pétrole et les accès de faiblesse du billet vert. D’après ses calculs, si la devise américaine était aujourd’hui aussi forte qu’en 2001, le cours du baril de pétrole aurait été, au début de l’année, au moins 20 dollars plus bas.

La stratégie qui consiste à tenter de renforcer le dollar en agitant la menace d’une hausse des taux ressemble surtout à un aveu d’impuissance. M. Bernanke pourrait difficilement relever le coût de l’argent aux Etats-Unis sans s’attirer la colère de l’opinion publique, de l’administration, des deux candidats à la présidentielle de novembre et des élus démocrates comme républicains.

La Fed est théoriquement indépendante, mais elle n’est pas insensible à son environnement politique et social. Or, les statistiques montrent que les Américains perdent leur emploi, leur maison et aussi leur confiance.

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