Obama vs. Joe the Plumber

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«Je dois aller me préparer pour le débat, mais ce qui vient de se passer est un bon entraînement». C’est ce qu’a dit Barak Obama, mardi, en quittant sa discussion avec «Joe le plombier», de son vrai nom Joe Wurzelbacher. Il l’avait rencontré près de Toledo, en Ohio.

Pendant le débat de mercredi, John McCain a fait de Joe le plombier son interlocuteur préféré, s’adressant directement à lui par caméra interposée. Obama lui a emboîté le pas, faisant de Joe l’électeur le plus populaire de la soirée.

Excellente stratégie pour McCain, car il pouvait comprendre, en ayant visionné l’échange Obama vs Joe, que le plombier d’Ohio serait plutôt républicain. En effet, Obama propose de taxer les revenus supérieurs à 250 000 $ par an au niveau où ils étaient sous Bill Clinton, soit 39% plutôt que 36% sous Bush. Or Joe compte acheter une entreprise dont les revenus dépasseront ce niveau. Il sera donc touché par cette taxe et n’aime pas du tout cette idée. Il n’est pas un milliardaire de Wall Street, mais un américain ordinaire qui travaille fort. L’illustration idéale pour la campagne – pour l’essentiel mensongère, sauf sur ce point – menée par McCain pour convaincre les Américains qu’Obama veut les taxer tous.

Joe a travaillé fort après le débat, expliquant aux médias que son vote était secret, mais reprenant essentiellement les arguments de McCain sur les questions de taxation et critiquant Obama pour une éloquence qui masque, selon lui, un déficit d’expérience. Bref, alors que les sondages instantanés donnaient Obama largement gagnant dans le débat, McCain avait au moins un allié dans l’Amérique moyenne, Joe le plombier.

(Si vous aimez l’idée voulant qu’un seul électeur pourrait détenir la capacité de décider d’une élection, c’est le scénario du film Swing Vote, avec Kevin Costner, sorti en août dernier.)

Il vaut la peine de regarder l’intégralité de l’échange Obama vs Joe, on le trouve ici car il nous informe sur le probable futur président américain. Obama est directement confronté par le problème fiscal de Joe, sous l’oeil de la caméra, et comprend immédiatement que cette conversation va lui poser une difficulté. Il commence par tenter de contourner le problème en soulignant que, grâce au futur président Obama, la compagnie de Joe va bénéficier d’un crédit d’impôt sur ses dépenses de santé. Mais il admet ensuite que, oui, l’imposition de Joe va augmenter. Puis il tente de mettre sa politique économique en contexte en disant que, si son plan avait été en application depuis 10 ans, alors que Joe faisait moins que 250 000$/an, le plombier aurait fait des économies d’impôt pendant tout ce temps. Cet argument hypothétique n’étant d’aucun secours, car Joe est un homme qui regarde en avant, pas en arrière, Obama en trouve un autre, un peu meilleur. Il affirme que la baisse d’impôt qu’il propose pour ceux qui font moins de 250 000 permettra aux futurs clients de Joe de le payer pour ses services.

Pendant tout l’échange, Joe tente de placer un mot et y arrive difficillement, car Obama parle sans arrêt, enfilant ses démonstrations comme autant de bouées qu’il se lance à lui-même.

Bref, le bilan du débat Obama vs Joe le plombier est le suivant. Le futur président est franc (il ne nie pas qu’il va taxer Joe), il sait réfléchir sur ses pieds et s’adapter à une situation difficile, mais il peut nous engloutir sous ses mots et écoute finalement assez peu.

Ah, en passant, oui, Obama a gagné le débat. Pas tant sur le fond que sur la forme. McCain était tendu comme un violon et toujours à l’attaque. Obama était cool. C’est ce qu’il fallait.

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