What is Obama’s True Personality?

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la fin de cette interminable course à la présidence américaine, les historiens vont pouvoir citer de nombreuses raisons de la victoire, aujourd’hui presque certaine, de Barack Obama: la crise économique, la guerre en Irak, le désir d’un «changement» profond après huit désastreuses années de George Bush et, oui, l’affreuse grimace de John McCain, lors du dernier débat, face au visage souriant de son rival.

Cependant, la vraie histoire du phénomène Obama reste pour l’essentiel inédite, du moins dans l’imagination populaire. Une bonne partie du peuple américain et des grands médias, redoutant un dernier sursaut du «Frankenstein républicain» symbolisé par John McCain, ne veut pas entendre de critiques sur les origines ou sur les idées de leur nouveau sauveur. Je ne les blâme pas, étant moi-même désespéré de voir McCain, homme pourtant pas bête, exprimer des bêtises du genre: «L’Amérique n’a jamais perdu une bataille au Vietnam» ou encore «Sarah Palin est une réformatrice qui sera ma partenaire».

Mais avant de couronner le jeune candidat démocrate et de fêter l’extraordinaire symbole que représente l’arrivée d’un Noir à la Maison-Blanche, peut-être faudrait-il passer en revue les défauts, les hypocrisies et, plus important, l’esprit essentiellement conservateur du vrai Obama, plutôt qu’un Obama créé par les agences de publicité et les machines de propagande. John McCain a beau invoquer des liens entre Obama et le «terroriste» William Ayers, le candidat d’origine africaine ne représente en aucune façon une menace pour le statu quo américain.

Tout d’abord, Obama ne porte pas le projet d’une réforme politique; au contraire, il est issu d’une faction du Parti démocrate qui incarne le pouvoir oligarchique. Formé à Chicago, ville dominée par le maire Richard

M. Daley et un conseil municipal dont 49 sièges sur 50 sont occupés par des membres de son parti, Obama exagère ses penchants bipartisans. Sans le soutien à part entière du tout-puissant Daley, le candidat démocrate serait aujourd’hui président d’un comité au sénat de l’État d’Illinois, au lieu d’être sur le seuil de la résidence présidentielle.

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En tant que membre de la machine politique démocrate, Obama a, il y a longtemps, renoncé à une réforme du système de financement des campagnes électorales. Avec une somme hallucinante de plus de 600 millions dans sa caisse électorale, le nouveau chef du Parti démocrate aura peu d’intérêt à imposer des limites à la mobilisation de l’argent électoral. On parle beaucoup de ces centaines de milliers de petits donateurs soutenant Obama avec des dons de moins de 100 dollars, mais ces chiffres impressionnants occultent la prédominance des dons regroupés des secteurs de la finance et des affaires et des lobbyistes. Aujourd’hui, le regroupement de dons numéro un (740 000 $) d’Obama vient de la très influente banque Goldman Sachs, berceau de l’actuel secrétaire au Trésor Henry Paulson ainsi que de Robert Rubin, principal conseiller de Barack Obama sur l’économie et ancien secrétaire au Trésor dans l’administration Clinton. Quelle ironie d’entendre John McCain, candidat du parti d’affaires traditionnel, reprocher à son adversaire soi-disant «socialiste» un excès de zèle auprès du secteur privé. McCain est handicapé par son adhésion au principe du financement public des élections. Ses 84 millions de fonds venant du Trésor américain (même ajoutés aux sommes considérables qu’il reçoit du Parti républicain) paraissent pitoyables à côté des sommes récoltées par Obama (150 millions en septembre seulement).

Par ailleurs, Obama n’est ni un candidat pour la «paix» ni un candidat tout à fait «antiguerre». Il est vrai qu’il s’est déclaré contre l’invasion de l’Irak avant qu’elle ait eu lieu. Or, depuis son investiture au Sénat fédéral, ses votes, soit pour le financement de l’occupation, soit pour une date fixe pour le retrait des troupes, ont été ultraprudents, voire identiques à ceux de sa rivale, le faucon libéral Hillary Clinton. Quant à sa volonté déclarée de mettre fin à la «guerre» en Irak au plus tard 16 mois après son investiture, les rumeurs parlent d’une promesse déjà rompue. L’entourage d’Obama est plein d’anciens conseillers du président Bill Clinton, dont des interventionnistes libéraux comme Anthony Lake, qui croient toujours dans la possibilité d’établir la démocratie au Proche-Orient. Ce sont eux, les partisans de «l’ingérence humanitaire», qui soutiennent Obama dans sa conviction que l’on devrait déplacer la guerre «contre le terrorisme» vers l’Afghanistan, bourbier meurtrier encore plus profond que l’Irak.

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Tout cela ne veut pas dire qu’Obama ne fera pas un bon président. Avec une augmentation de la majorité démocrate au Congrès, et surtout au Sénat, Obama pourrait se sentir libéré des contraintes imposées par les tactiques d’urgence d’une campagne. Après tout, il est un intellectuel libéral cité au dos d’un ouvrage du grand philosophe et théologien Reinhold Niebuhr — «l’un de mes philosophes préférés». Déjà, avoir un président qui connaîtrait les noms de quelques philosophes me semble plutôt encourageant. Les idées banales d’Obama en faveur du libre-échange et de la sécurité nationale pourraient bien cacher une politique plus intéressante.

En outre, un Noir à la Maison-Blanche (même né d’une mère blanche) pourrait aussi servir d’inspiration aux Afro-Américains toujours déshérités, toujours en recul par rapport aux Blancs sur le plan social et économique. Chiffre stupéfiant: aux États-Unis aujourd’hui, parmi les hommes noirs âgés de 18 à 24 ans, 10,5 %, soit presque 200 000, sont en prison. Je ne suis pas partisan des gestes symboliques, mais peut-être que celui-ci pourrait mener à une société un peu plus juste.

Néanmoins, je suis pessimiste. Accablé par la crise économique, un président Obama aura du mal à tenir ses promesses de campagne, principalement au sujet de l’assurance santé. Par ailleurs, Obama s’est montré beaucoup moins audacieux lors du vote sur le projet de sauvetage de Wall Street offert par l’administration Bush. Confronté à une révolte à la Chambre des représentants («la Maison du peuple»), Obama, avec John McCain, a incité ses collègues récalcitrants à voter une loi qui donne au secrétaire au Trésor, l’un des architectes de la crise durant sa carrière à Goldman Sachs, 700 milliards pour sauver le pain de ses amis avec l’argent du contribuable. Il se peut que la vraie élection — le référendum sur la réforme et la souveraineté populaire — ait déjà eu lieu.

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