The Prohibited Failure

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Deux guerres et la plus grave récession depuis les années 1930 : les défis auxquels se trouve confronté Barack Obama sont spectaculaires. Nul n’en mesure l’ampleur mieux que lui, tant il s’est préparé à une charge qu’il exerce déjà virtuellement depuis son élection triomphale du 4 novembre dernier et l’éclipse de George W. Bush. Mais comme il le rappelait lui-même il y a quelques jours lors d’une longue interview télévisée, il ne saurait y avoir qu’un seul président à la fois. Et il faut être installé dans le bureau d’Abraham Lincoln pour prendre pleinement conscience de la réalité écrasante de la fonction de président des Etats-Unis d’Amérique.

L’attente que suscite le 44e président américain est exceptionnelle, aux Etats-Unis et au-delà des frontières. Avec Obama, messie noir, l’Amérique renoue, aux yeux de beaucoup, avec le meilleur de sa légende, celle de la « cité sur la colline » vantée par les Constituants, d’une Amérique évangélique, phare d’espoir et de liberté pour les désespérés de l’Ancien Monde. D’où cette fièvre touchante et sincère, cette « obamania » qui s’est emparée d’opinions publiques à la fois effarées par la profondeur de la crise et percevant le nouveau président comme un recours contre les maux de l’époque.

Tout cela fait beaucoup pour l’homme désormais « in charge » à Washington. Certes. Mais n’en déplaise à ceux qui, justement, succombent un peu trop vite à l’« obamania », le nouveau président américain a surtout été élu par ses concitoyens pour reconstruire l’économie américaine. Sa responsabilité première – « my job » – est de créer ou sauver des millions d’emplois alors que le pays en perd à un rythme d’un demi-million par mois depuis l’automne.

C’est l’objet de l’« American Recovery and Reinvestment Plan » de 825 milliards de dollars qu’il a élaboré depuis quelques semaines avec les élus du Congrès. Avant de s’atteler à sa tâche de Sisyphe, Obama a prévenu : il faudra « des années » avant de retrouver la prospérité. Le taux d’épargne des Américains est tombé à zéro, l’endettement s’est envolé et la chute de la valeur des logements a brisé un fondement majeur de la confiance des citoyens.

Prenant la tête d’un pays en pleine déroute économique en 1932, Franklin Roosevelt eut un jour cette formule d’apocalypse : « Si j’échoue, j’aurai été le dernier… » Le même sens de l’urgence, la même interdiction de l’échec habite Barack Obama. Il doit réussir son New Deal. Pour les Etats-Unis bien sûr, mais aussi pour le reste du monde.

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