«Enfin les difficultés commencent.»
La formule d’un proche de Léon Blum au moment de son arrivée au pouvoir en 1936 s’applique, ô combien ! à Barack Obama franchissant le seuil de la Maison-Blanche.
L’immense espoir soulevé à travers le monde par la longue et triomphale chevauchée du sénateur de l’Illinois vers Washington va enfin déboucher sur l’action après une longue, trop longue transition.
Un homme seul peut changer le destin du monde.
C’est du moins ce que veulent croire l’immense majorité des Américains et des dizaines et des dizaines de millions d’hommes et de femmes à travers le monde saisis par une frénétique, sympathique mais naïve «obamania».
Les Américains ont élu Obama pour conjurer la crise, relancer l’économie, vaincre le chômage, sauvegarder leur logement, protéger leur retraite, améliorer leur assurance-maladie, défendre leur environnement ; bref, empêcher le déclin économique des États-Unis et l’effondrement de l’économie mondiale.
Ce sera la première et absolue priorité du nouveau président, qui espère créer quatre millions d’emplois en injectant près de mille milliards de dollars dans l’économie, principalement sous forme d’investissements publics et d’allégements d’impôts pour les entreprises et la majorité des ménages.
Franklin Delano Roosevelt, élu en 1932, en pleine dépression mondiale, avait lui aussi lancé un énorme plan de relance. Mais le New Deal n’avait pas produit d’effet miraculeux immédiat.
Il avait même fallu attendre l’engagement américain dans la Seconde Guerre mondiale pour que l’économie tourne à nouveau à plein régime.
Le 44e président, Obama, est à tous égards très dissemblable du 32e, Roosevelt. Mais l’immense différence pour l’Amérique est que l’économie d’aujourd’hui est devenue globale. La mondialisation a rendu interactives toutes les zones régionales et toutes les économies nationales. Et donc, le président de la plus riche nation du monde, quelle que soit la puissance de ses leviers de commande, devra accepter de coordonner son action avec les autres grands acteurs de l’économie : la Chine et les pays émergents, Russie, Brésil, Inde en tête, mais aussi les pétromonarchies, qui détiennent le pétrole et le gaz, et, bien sûr, l’Europe, dont le produit intérieur brut est supérieur à celui des États-Unis.
La réalité d’un monde multipolaire qui avait échappé à George Bush et à ses conseillers trop longtemps aveuglés par l’«axe du mal» s’imposera au nouveau président.
Barack Obama serait bien inspiré de prendre en compte ce monde nouveau, en acceptant de définir la rénovation des règles de l’économie internationale en liaison avec l’ensemble des acteurs mondiaux.
Mais on forme aussi un autre vœu, à l’aube de cette présidence. Que le président Obama, confronté aux désordres de la planète – Moyen-Orient, Afghanistan, Iran, Caucase – et aux maux de l’époque – terrorisme, islamisme, fanatismes de toute obédience -, que Barack Obama ne cherche pas à imposer des solutions purement américaines. Qu’il accepte toutes les conséquences du multilatéralisme. Et d’abord le fait que l’Amérique doit avoir des alliés et non des vassaux, des partenaires et non des affidés.
Alors si, comme l’a dit avec conviction le nouveau président, «l’Amérique est l’amie de toutes les nations et de chaque homme, femme et enfant qui recherche un avenir de paix et de dignité», alors l’espoir qui s’est levé hier au seuil de la Maison-Blanche débouchera sur un peu moins de désordre et un peu plus de justice.
«Yes we can !» Encore faudra-t-il que Barack Obama se donne les moyens de tenir ses promesses.
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