Se pourrait-il que tant de méfiance et de rancune soient effacées d’un trait de plume? Que l’antagonisme entre les Etats-Unis et l’Iran, cette pierre angulaire des relations internationales depuis trois décennies, devienne soudainement caduc? Soumis à des secousses d’une ampleur extraordinaire, le monde se cherche. De gré ou de force, il semble aujourd’hui prêt à entrouvrir tous les chantiers: celui du système financier et de la révision du capitalisme, celui des institutions internationales censées se préoccuper des enjeux qui, du réchauffement climatique à la lutte contre les injustices criantes, avaient été laissés de côté à force d’être trop «globaux».
Les Etats-Unis d’aujourd’hui paraissent aussi mouvants que ce contexte. Ils sont pris dans un double mouvement de reconnaissance de leur responsabilité planétaire et de modestie inhabituelle. Surtout, ils se sont donné un nouveau président qui continue de décoiffer. Jeudi, Barack Obama était le premier président à participer à un célèbre talk-show télévisé. Entre deux explications sur la crise économique, il y plaisantait sur l’ampleur de son escorte personnelle et sur les manières politiques qui règnent à Washington. Le lendemain, il lançait la «diplomatie YouTube» comme on l’a immédiatement baptisée, en tendant la main aux Iraniens et à leurs dirigeants dans un message qui a aussitôt fait le tour du Web et qui sera sans doute le thème principal, en Iran, des discussions familiales du Nouvel An perse.
S’adressant aux Américains à la télévision ou aux Iraniens sur Internet, Barack Obama est aussi à l’aise qu’un poisson dans l’eau. Littéralement, il colle à son époque. Son apparente sincérité rend son discours immédiatement crédible, et ses appels à la raison semblent presque vider de leur substance les inimitiés en apparence aussi profondes – et aussi savamment entretenues depuis des décennies – que celles qui opposent Washington à Téhéran.
Le contexte de crise est le pire de tous pour parvenir au genre de miracles que vise le nouveau président américain. Les relations se tendent, les pauvres s’appauvrissent encore, les égoïsmes grandissent, les révoltes éclatent. Pourtant, en désarçonnant de la sorte, par un mélange permanent de lucidité et de candeur, Barack Obama ouvre aujourd’hui des avenues qu’il sera très difficile à ses adversaires, ou à ses alliés, de refuser d’emprunter.
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