GM and Beyond

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Il n’y a donc pas que les banques qui sont “too big to fail” – trop importantes pour qu’on les laisse disparaître. Il y a aussi l’automobile. Fait unique dans l’histoire, celle qui fut jadis la première entreprise mondiale – General Motors – est aujourd’hui majoritairement détenue par deux gouvernements : les Etats-Unis (60 % du capital) et le Canada (12 %). Ceux-ci ont poussé jusqu’au bout la logique d’aide publique à ce secteur dont viennent aussi de bénéficier, entre autres, Renault, PSA Peugeot Citroën (6 milliards d’euros d’aides publiques à eux deux), Toyota (1,6 milliard de dollars), sans parler des primes à la casse qui se généralisent.

On a rarement vu actionnaires si peu enthousiastes. Barack Obama a même promis de ne pas intervenir dans la stratégie du constructeur, oubliant de rappeler que c’est la Maison Blanche qui a annoncé, voici quelques semaines, la nomination du nouveau PDG. Quant au gouvernement conservateur canadien, il a jugé “nécessaire mais inévitable” l’injection de capitaux publics. Le malaise, perceptible à Washington comme à Ottawa, s’explique : la logique de cette intervention est loin d’être évidente. A la différence des banques en difficulté, GM souffre moins de la crise économique actuelle que de ses erreurs stratégiques passées et du coût de la protection sociale. Mais s’il s’agit de porter sur les fonts baptismaux l’industrie automobile verte de demain ou d’aider les salariés de GM à se reconvertir, la nationalisation n’est pas forcément la meilleure solution. Celle-ci va rapidement mettre les deux Etats face à leurs contradictions : assumeront-ils la fermeture d’usines ? Combien de temps ses concurrents vont-ils accepter que GM consente des rabais à ses clients alors qu’il vit sous perfusion ?

Les mêmes incohérences valent pour l’Europe. En intervenant directement dans le sauvetage d’Opel et en remettant les clés à un bien étrange attelage formé par un équipementier canadien et une banque russe, Angela Merkel a sans doute fait davantage preuve d’opportunisme électoral que de stratégie industrielle. Refuser la proposition d’alliance avec Fiat et simultanément signer avec Nicolas Sarkozy une tribune qui appelle l’Europe à “favoriser l’émergence d’entreprises européennes puissantes à l’échelle mondiale” nécessite pour le moins une explication de texte. Des deux côtés de l’Atlantique, les interventions publiques dans l’automobile apparaissent moins comme le signe d’un retour réfléchi de l’acteur public dans l’industrie que comme celui d’un sauve-qui-peut général qui, malheureusement, tourne déjà au chacun pour soi.

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