Les premiers avertissements n’ont pas été pris au sérieux. En mars, le gouverneur de la Banque centrale de Chine a proposé de remplacer le dollar comme monnaie de réserve par un panier de monnaies. En mai, la Chine et le Brésil ont annoncé qu’ils éviteraient maintenant le billet vert dans leurs échanges bilatéraux. La fronde se développe contre la devise américaine, vouée à se déprécier : les Etats-Unis ont désormais une telle dette que le rééquilibrage de l’économie mondiale passe par un rebond de leurs exportations, lequel suppose une baisse du dollar. Or la Chine – qui détient 2 000 milliards de réserves en dollars ! – ne veut pas se retrouver avec de la monnaie de singe.
Un système monétaire est toujours un bras de fer entre des emprunteurs, qui appellent l’inflation de leurs voeux (elle diminue de fait leur dette), et des prêteurs, qui veulent une monnaie forte. Or l’Histoire a montré que les nations prêteuses finissent toujours par fixer les règles du jeu. Des empires en sont morts ! Nous sommes aujourd’hui à l’un de ces carrefours historiques : un nouvel ordre monétaire mondial va naître.
Depuis un siècle, nous en avons connu trois. Jusqu’en 1944, il était régi par l’étalon or, cette « camisole de force » commune à tous. Puis s’est imposé l’étalon dollar, né des accords de Bretton Woods, qui prennent acte de la montée en puissance des Etats-Unis, dont l’Europe est devenue la débitrice. Enfin, on est entré dans l’ère des changes flottants lorsque les Etats-Unis ont décidé, en 1971, de « décrocher » le billet vert de sa valeur en or : le dollar reste la référence, avec le yen et le mark, puis l’euro, en guise de chétives alternatives. Mais si le système a perduré jusqu’à ce jour, l’une des clefs de son succès – la montée en puissance de la Chine et des pays pétroliers finançant, par leurs excédents commerciaux, les déficits américains – signe aussi sa fin.
Par quoi remplacerons-nous le dollar ? L’or, cette « relique barbare » ? C’est un refuge, pas une monnaie pratique. L’euro ? L’Europe aurait du mal à en digérer l’inévitable renchérissement. Les DTS (droits de tirage spéciaux du FMI), préconisés par Joseph Stiglitz ou George Soros ? Ils sont très (trop) complexes. Une seule certitude : la Chine et les autres « fourmis » ont commencé à diversifier leurs réserves. Et les Etats-Unis, à souffrir.
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