Redemption

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Cent cinquante ans de prison : l’absurdité du nombre des années de détention infligées à Bernard Madoff tient à une bizarrerie du droit pénal américain. Mais elle renvoie aussi à un symbole ironique : ces années de prison en excès sont celles auxquelles bien d’autres responsables de cette affaire ont échappé.

Bernard Madoff n’est certes pas un bouc émissaire. Il a ruiné de nombreux épargnants, dont beaucoup ne roulaient pas sur l’or et doivent maintenant finir leur vie dans la gêne pour lui avoir fait confiance. Mais il est tout autant le symbole d’un système, et même d’une idéologie. Celle du laissez-faire financier. A tous ceux qui criaient casse-cou – ils furent plus nombreux qu’on ne croit -, on répondait que le libre jeu du marché valait toutes les régulations, que la triche était une réalité marginale, que le remède du contrôle public serait pire que le mal.

Cette idéologie a-t-elle baissé pavillon devant les désastres accumulés ? En aucune manière. La condamnation à vie de Madoff agit comme une rédemption. Le système montre qu’il est impitoyable avec ceux qui tombent. Il peut donc perdurer dans la sérénité retrouvée. On attendra que la parenthèse de la crise se referme pour reprendre les choses où on les avait laissées. L’administration Obama et les autorités de régulation, certes, veulent de vraies réformes. Mais elles ont en face d’elles de puissants intérêts appuyés sur des idéologues intelligents et créatifs. La bataille est en cours. Quelques avancées ont été obtenues, bien moindres qu’on pourrait l’espérer. La sanction de Madoff exonérera-t-elle les responsables ?

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