American States Going Bankrupt

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Alors que le déficit fédéral dépasse les 1 000 milliards de dollars, 48 des 50 États américains cumulent un trou de 166 milliards. La Californie est au bord de la cessation de paiements.

Pourquoi ne pas légaliser la marijuana et la taxer pour combler en partie de déficit budgétaire ? C’est l’une des dernières idées en date lancées dans la course folle de la Californie pour trouver des solutions à son «trou» de 26,3 milliards de dollars. Une taxe sur l’herbe pourrait rapporter un milliard de dollars, selon un élu démocrate qui a déposé une proposition de loi dans ce sens, remise au goût du jour par une campagne de pub récente pour la légalisation.

Premier État américain par son poids économique, la Californie est en quasi-cessation de paiements depuis le 1er juillet. Le gouvernement local est contraint depuis lors d’émettre des titres de reconnaissances de dettes pour payer ses fournisseurs et verser les prestations à ses citoyens en attendant que le gouverneur républicain Arnold Schwarzenegger et le Parlement démocrate trouvent un accord sur le budget. Depuis cette semaine, les banques n’acceptent plus ces titres. Le déficit budgétaire prévisionnel californien pour l’année en cours atteint un niveau record de 58 % des revenus de l’État. Alors que la crise aggrave chaque jour le déficit, le gouverneur a annoncé en début de semaine aux syndicats qu’il devrait encore supprimer 2 000 emplois publics pour réduire les dépenses de l’État.

Contrairement au gouvernement fédéral, la Constitution américaine interdit aux États d’afficher un déficit, à l’exception du Vermont. Chaque année, c’est donc un exercice périlleux pour trouver l’équilibre entre recettes et dépenses. Mais plus encore en période de récession, quand les revenus des ménages diminuent, affectant les prélèvements obligatoires, quand la consommation ralentit, touchant la TVA, quand les entreprises font moins de bénéfices. Du coup, 48 États sur 50 ont dû faire face à un déficit pour l’année en cours. En moyenne, le déficit atteint 24 % des revenus des États, ce qui représente un besoin de financement cumulé de 166 milliards de dollars.

Pour sortir du rouge, les États rechignent à augmenter les impôts en période de récession, ou à trop tailler dans les dépenses sociales. Alors qu’ils étaient censés trouver une solution à leur casse-tête budgétaire avant le 1er juillet, au moins sept États – Californie, Arizona, Illinois, Ohio, Pennsylvanie, Connecticut, Caroline du Nord – négociaient encore cette semaine des ajustements à leurs budgets, en raison de tensions politiques.

Entre gouverneurs et assemblées législatives, c’est la hausse de la fiscalité qui entretient le blocage. À ce jour, 30 États ont choisi d’augmenter les impôts et au moins sept autres s’apprêtent à le faire. Réduite au niveau fédéral depuis les années Reagan, la charge fiscale a été largement transférée vers les États et autres collectivités territoriales, comtés ou municipalités. Lorsqu’un accord est trouvé, l’équilibre est toutefois vite dépassé. Dans douze États, les budgets adoptés pour la nouvelle année fiscale sont déjà dans le rouge, alors même qu’ils n’ont pas le droit d’emprunter pour financer leurs dépenses de fonctionnement.

Aide du plan de relance

«C’est une situation sans précédent depuis la dépression des années 1930» , commente Surjit CanagaRetna, analyste au Conseil des gouvernements d’États. Même si l’économie repart, la crise budgétaire demeurera. Entre janvier 2009 et fin 2011, le manque à gagner en recettes fiscales est estimé à 350 milliards de dollars. Dans un tel contexte, l’éventail des solutions n’est pas illimité : tirer dans les réserves, ce qui a été largement fait depuis un an ; réduire les dépenses courantes ; augmenter les impôts ou créer de nouvelles recettes, en développant les jeux de hasard, casinos ou loteries, par exemple. Au moins 39 États ont déjà adopté des réductions de coûts, touchant en particulier l’éducation, la santé et les services sociaux.«Le plus grave, c’est que ces diminutions de prestations publiques touchent les citoyens les plus vulnérables au moment où ils en auraient le plus besoin, car ils sont fragilisés par la récession. Ce qui risque, dans un cercle vicieux, d’aggraver encore la situation économique du pays», s’inquiète Jon Shure, membre du Center on Budget and Policy Priorities.

L’Administration Obama est venue à la rescousse des États en difficulté par le biais du plan de relance de 787 milliards de dollars. Une partie de cette somme est réservée aux collectivités territoriales. En théorie, elle doit créer des emplois par de vastes programmes d’investissement. Mais en réalité, l’argent fédéral sert à boucher les trous : il a permis de combler 40 % des déficits budgétaires des États.

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