Si Obama couvre Bush, rien ne nous oblige à tolérer la torture
ALAIN LALLEMAND
mardi 25 août 2009, 07:24
A nouveau, notre actualité est éclaboussée des crimes commis par la CIA lors d’interrogatoires inhumains. Malgré les tirs de barrage républicains, malgré le réal-opportunisme d’un président Obama peu enclin au grand déballage, cette fois la justice américaine ne peut plus esquiver la désignation d’un procureur spécial chargé de nettoyer les écuries Bush.
Tant mieux. Car notre émerveillement béat face à Obama allait nous faire oublier qu’un président qui veut « aller de l’avant » et ne pratique pas le rétroviseur ressemble furieusement à un président amnésique. Or « sa » Justice lui rappelle soudain les devoirs de « la » morale. Et ce rappel moral s’impose aussi à l’Europe puisque, comme le veut la subsidiarité du droit, si les Etats-Unis faisaient l’économie d’une enquête sur ses tortionnaires, il reviendrait aux tribunaux d’Europe (d’Espagne et/ou d’Allemagne) de s’en emparer.
Martelons le mot : « morale ». Pas question d’absoudre le passé américain si l’Amérique, elle-même, ne se résout pas à l’introspection. L’Europe ne doit tenir nul compte des calculs partisans qui s’imposent aujourd’hui à la Maison-Blanche. L’Amérique ira-t-elle jusqu’au bout des enquêtes disciplinaires, criminelles et historiques qui s’imposent à elle ? Sinon, l’Europe est-elle prête à jouer ce rôle ? Est-elle également prête à incriminer, demain, des exactions qui se commettraient sous administration Obama parce que ce dernier n’a pas osé totalement réformer les mœurs américaines ? Car au moment où Hollywood continue à nous servir ad nauseam ses Inglourious Basterds et le culte de la violence gratuite face à des prisonniers de guerre, il est moralement essentiel que nous rappelions à nos enfants et à nos amis américains notre opposition à toute torture ou traitement irrégulier d’un détenu.
Dans l’immédiat, il est essentiel que nous désapprouvions l’idée – avalisée par Obama – d’interrogatoires qui ne commenceraient pas par la lecture des droits du détenu. L’Amérique ne nous écoutera pas ? Mais si, bien sûr : car si les Américains continuaient à maltraiter et à torturer en coulisses en Afghanistan, l’Europe ne pourrait moralement rester à Kaboul. Menaçons. La Maison-Blanche nous écoutera.
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