Edited by Joanne Hanrahan.
Proofread by Tim Gehring
On dit de Barack Obama qu’il est tourmenté par la décision d’envoyer d’amples renforts en Afghanistan. On le comprend. C’est la plus importante décision qu’il aura à prendre à titre de commandant en chef, mais aussi comme candidat à sa réélection en 2012.
Obama est un peu dans la position de l’ex-président Lyndon Baynes Johnson, qui, en 1965, quelques mois pourtant après une victoire électorale triomphale, menée notamment sur le thème de la «grande société» et du désengagement de la guerre au Viêtnam, opta finalement pour une «escalade» qui se voulait limitée et circonstancielle.
On connaît la suite. LBJ mit en fait le pied dans un engrenage dont il ne savait comment sortir au Viêtnam. Trois ans plus tard, la «grande société» se faisait toujours attendre, il renonça finalement à briguer un second mandat.
Les généraux concernés par la guerre en Afghanistan, notamment David Petraeus et Stanley A. McChrystal, commandants des forces américaines au Moyen-Orient et en Afghanistan, réclament de 40 000 à 60 000 soldats supplémentaires. L’OTAN aussi demande aux pays membres de 10 000 à 15 000 soldats supplémentaires pour la seule région de Kandahar.
Tout cela pour mener une guerre qu’on admet ne pouvoir gagner militairement. L’essentiel est de sécuriser suffisamment le pays pour «gagner les coeurs et les esprits» et de former une armée et une police afghane capables de faire face à l’insurrection. C’est l’«afghanisation» de la guerre, dont nul en fait ne peut prévoir l’issue, une «porte de sortie honorable» pour le cas où, en cas de victoire de l’ennemi, c’est-à-dire les talibans, dans un délai décent, on ne puisse établir de cause directe et immédiate entre cette victoire et le retrait des alliés. C’est une solution à très long terme, voire à trop long terme.
Contrairement à LBJ, Obama n’a pas promis de désengagement en Afghanistan. Contrairement à Nixon, il ne parle pas d’«afghanisation» de la guerre. Obama parle au contraire d’une «guerre de nécessité» en Afghanistan. Il s’est interdit de ce fait une réduction des troupes et à plus forte raison un retrait plus ou moins unilatéral.
Mais son opinion publique lui interdit en même temps de répondre à la requête des généraux Petraeus et McChrystal, laquelle sont de toutes manières loin de faire consensus au Pentagone.
L’opération que semble privilégier le président américain est en fait de «pakistaniser» la guerre, parce que c’est au Pakistan – s’il doit y avoir victoire militaire ou apparence de victoire militaire – qu’elle sera au rendez-vous. C’est là, dans les fameuses «zones tribales» que sont réfugiés Al-Qaida et les talibans purs et durs qui donnent le ton à l’insurrection afghane. L’opération, croit-on, est matériellement moins exigeante que l’«afghanisation», avec des résultats attendus plus rapides.
Mais elle a ses coûts et ses incertitudes. Jusqu’à quel point peut-on compter sur l’armée pakistanaise dont la grande offensive terrestre, dans ces fameuses zones, attendue n’en finit pas d’être imminente?
On parle de frappes aériennes amplifiées, toujours dans les fameuses zones tribales. Et si cela ne suffit pas, faudra-t-il des opérations au sol avec ou sans le consentement du Pakistan.
C’est là plus qu’une «escalade», c’est un élargissement de la guerre que la chose implique. Obama n’est pas seulement dans un dilemme analogue à celui de LBJ, mais aussi comparable à celui de Richard Nixon quand, par des frappes aériennes, il a élargi la guerre du Viêtnam au Cambodge voisin en 1969, au nom du désengagement.
À sa manière, le Pakistan est un piège plus redoutable pour Obama que le Viêtnam et le Cambodge pour Johnson et Nixon, ou même l’Afghanistan pour George W. Bush. Barack Obama est aussi devant un choix électoral.
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