L’Amérique d’Obama, une puissance intelligente ?
Professeur en études stratégiques et diplomatiques et directeur du bureau Asie de l’Iris (Institut pour la Recherche internationale et Stratégique), Barthélémy Courmont fait un point sur la redéfinition de la politique étrangère américaine par Obama: la fin du hard power façon Bush, mais également le refus d’un retour au soft power de Clinton. Le concept en vogue relève plus du smart power: l’Amérique puissance intelligente ?
Huit ans après les attentats du 11 septembre 2001, et consécutivement à l’arrivée à la Maison-Blanche de Barack Obama, les Etats-Unis se sont engagés dans une vaste redéfinition de leur politique étrangère. Si la lutte contre le terrorisme international reste une priorité sécuritaire, l’Amérique se sent aujourd’hui moins menacée, et se tourne vers de nouveaux objectifs, associant ambition et réalisme.
Entre puissance intelligente et responsabilité, la nouvelle administration entend ainsi donner un nouveau cap à la politique étrangère américaine, mais avec quels objectifs, et surtout quels résultats possibles ?
Qu’est-ce que la puissance intelligente ?
La puissance intelligente (smart power) est le nouveau terme désignant la politique étrangère de l’administration Obama. Le concept a été développé au départ par Joseph Nye, déjà instigateur du soft power, et formulé par Hillary Clinton à l’occasion de plusieurs interventions sur l’engagement américain sur la scène internationale. En substance, la puissance intelligente propose de concilier les outils du hard power (puissance militaire, économie), et du soft power (diplomatie, culture, capacité d’influence) pour proposer une politique étrangère à la fois cohérente, acceptable, et capable de s’imposer. Une rupture avec le hard power des années Bush, mais également le refus d’un retour aux années Clinton, et à un soft power poussé à l’extrême, et aux effets parfois discutables. La puissance intelligente est un compromis entre la nécessité de proposer une politique étrangère ferme sur des dossiers tels que la prolifération des armes de destruction massive et le terrorisme, mais dans le même temps ouverte à la coopération, et à l’écoute des requêtes des alliés de Washington, mais également de ses adversaires potentiels. Le smart power est donc avant tout la marque d’un réalisme retrouvé en politique étrangère.
Quelle responsabilité ?
Autre slogan à la mode, la responsabilité de Washington sur la scène internationale consiste à ne pas refuser les obligations propres à la première puissance mondiale. Barack Obama estime ainsi que, en opposition avec un repli sur soi, et sans pour autant privilégier un engagement trop marqué, les Etats-Unis doivent rester la puissance indispensable, présente sur les principaux dossiers internationaux, mais agissant dans le même temps de concert avec ses alliés et les autres grandes puissances. Un gendarme du monde refusant l’unilatéralisme.
Il s’agit donc avant tout d’une responsabilité vis-à-vis du multilatéralisme, et des attentes de l’opinion publique, américaine et internationale, qui ne souhaite pas voir Washington se replier sur soi et céder à la tentation de l’isolationnisme. Parmi les gestes très forts de cette volonté de responsabiliser la politique étrangère, on note les nominations des émissaires spéciaux Mitchell au Moyen-Orient, Holbrooke en Asie centrale, ou encore Bosworth en Corée du Nord, mais aussi les engagements de Washington en faveur d’un règlement mondial de la crise économique, et une attention plus nette portée sur des enjeux tels que le réchauffement climatique ou l’environnement.
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