Nous publions aujourd’hui le premier de deux éditoriaux sur l’avenir des États-Unis.
Depuis un demi-siècle, on a tant de fois annoncé le déclin de l’empire américain que l’expression n’est plus qu’un cliché vengeur dont le sens véritable s’est perdu. Pourtant, les États-Unis n’ont jamais été aussi proches qu’ils le sont aujourd’hui d’une baisse de régime permanente de leur influence dans le monde, de leur capacité d’innover, de leur économie.
En ce sens, la Lune est un symbole.
Le président Barack Obama a annoncé, cette semaine, qu’il ne verserait pas la modeste allocation de 3,5 milliards US (sur un budget de 3800 milliards!) prévue pour le programme Constellation de vols habités vers la Lune. Chacun a compris. Les Américains renoncent. Ils renoncent à explorer à nouveau l’espace dans un avenir prévisible. Et peut-être cela veut-il dire: à tout jamais, parce que redémarrer une telle aventure ne se fera pas en un jour.
Nous verrons quel effet psychologique, scientifique, économique, ça aura aux États-Unis. Pour l’instant, notons que, la nature humaine étant programmée pour explorer, d’autres nations prendront forcément la relève.
Apprenant cette déconfiture, même l’Iran, qui n’a aucune chance d’entrer dans la course, s’est néanmoins vanté, hier, d’avoir lancé des animaux dans l’espace: un rat, deux tortues et des vers de terre! L’Inde, qui fait équipe avec la Russie, compte aller sur la Lune en 2025. Enfin, la Chine a déjà effectué des vols habités et, dans le secret, prépare des expéditions lunaires qui pourraient étonner, peut-être avant 2020.
Or, la Chine est déjà la banque, l’usine et l’entrepreneur «impérial» de la planète… exactement ce qu’étaient, il n’y a peu, les États-Unis. Et lorsqu’elle aura annexé le symbole de la Lune, les cerveaux formés partout dans le monde choisiront de s’exiler, d’inventer et de créer, non plus à Los Angeles, mais à Shanghai – ça a déjà débuté.
Alors, l’empire américain, surtout fondé sur le savoir, la culture et l’invention, aura vécu.
Quelqu’un a dit: les empires ne sont pas assassinés, ils se suicident.
Est-ce exact?
Chose sûre, le dernier empire européen, celui de la Grande-Bretagne, a bel et bien été victime du suicide de l’Europe, commis à l’aide des deux grandes guerres et des divers totalitarismes qu’elle s’est donnés et a gracieusement donnés au monde. Le flambeau a été passé de façon définitive quelque part entre 1942 et 1945 lorsque l’Amérique a pris le contrôle des voies maritimes, auparavant assumé par les Britanniques (le symbole, alors, n’était pas la Lune, mais la mer). Ensuite, le dollar, le transistor, le jazz et le Coca-Cola ont fait le reste.
Bref, la question est: l’empire américain est-il en train de se suicider? En partie, oui. Mais on l’assassine aussi.
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