What Isn’t Going So Well at the Capitol

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Ce qui ne va pas au Capitole, par Alain Frachon

Bientôt, il n’y aura plus de Kennedy au Congrès des Etats-Unis. Pour la première fois depuis soixante-quatre ans. Explication : il y a deux semaines, Patrick Kennedy, élu démocrate du Rhode Island, a annoncé qu’il ne se représenterait pas aux élections de novembre. Il quittera la Chambre des représentants, où il siège depuis seize ans. Patrick est le fils du sénateur Ted Kennedy, mort le 25 août 2009, et le neveu de l’ex-président John Kennedy, élu à la Chambre en 1946, avant d’être sénateur puis, en 1960, de conquérir la Maison Blanche.

Washington sans un Kennedy sur la colline du Capitole, “c’est la fin d’une époque”, a commenté la presse. Ce n’est pas porter tort à Patrick que de dire qu’elle pensait surtout à Ted en formulant ce commentaire. L’affaire n’est pas seulement sentimentale. Ted Kennedy incarnait une manière de faire de la politique dont les Américains ont la nostalgie.

Ancré à l’aile gauche du Parti démocrate, volontiers populiste, il était aussi homme de compromis. Le patricien catholique de Nouvelle-Angleterre, pas ennemi du bourbon, formait avec son collègue républicain de l’Utah, Orrin Hatch, mormon et buveur de thé, un couple de législateurs auquel on doit nombre d’avancées sociales.

Aujourd’hui, Washington se lamente : ce temps de la politique bipartisane semble révolu. Des textes “lourds” sont bloqués, faute de majorité qualifiée : énergie et climat, soutien à l’emploi, régulation financière, déficit budgétaire. Les républicains dénoncent les dérives de gauche des démocrates ; ceux-ci stigmatisent l’obstructionnisme “nihiliste” de leurs adversaires. Presse et politologues rivalisent de diagnostics lugubres : la démocratie américaine est malade, le Congrès grippé, Washington en panne.

Barack Obama s’est fait élire en promettant de changer la manière dont Washington travaille. Pour son plan d’assurance-santé, il affirme vouloir une majorité bipartisane. A vrai dire, il y a beau temps qu’il n’y a plus guère de ces majorités-là au Congrès dont la paralysie a d’autres causes, et notamment celle-là : le financement des campagnes électorales.

Pourquoi nombre de démocrates ne manifestent aucun empressement à voter une réforme du fonctionnement des marchés financiers, demande Robert Reich, ancien ministre de Bill Clinton ? Réponse : “Les firmes de Wall Street et leurs patrons (…) sont devenus l’un des plus gros contributeurs (des campagnes) des démocrates, écrit-il dans le FinancialTimes” (12 janvier). En 2009, Wall Street a distribué 42 millions de dollars aux campagnes de différents élus, explique Reich, mais tout spécialement aux membres des commissions bancaires du Sénat et de la Chambre. Sans compter 344 millions en lobbying direct auprès du Congrès. Si la grande démocratie américaine a besoin d’une réforme, bipartisane, à la Kennedy-Hatch, le sujet est tout trouvé : le financement des campagnes électorales.

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