The Convoy of Rebels of the “Tea Party Express”

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Le convoi des révoltés du «Tea Party Express»

Armelle Vincent

• Le mouvement ultraconservateur a entamé un voyage à travers tous les États-Unis pour mobiliser contre l’Administration Obama.

Au matin, un long défilé de voitures, de motos et de caravanes ornées de drapeaux commence à converger vers une carrière de Searchlight, bourg squelettique de 500 habitants : un casino désuet, quatre vraies maisons, une dizaine de préfabriqués et une cinquantaine de roulottes posés anarchiquement dans ce coin désertique du Nevada.

Les organisateurs du Tea Party Express, un convoi transportant un bataillon de révoltés ultraconservateurs vers Washington via 42 étapes, ont choisi Searchlight comme point de départ parce que c’est ici que réside Harry Reid, 71 ans, chef de la majorité démocrate au Sénat. Les quelque 8 000 militants présents sont venus demander la tête de cet homme honni, car jugé en partie responsable du passage de la réforme de la santé. «Harry, bonne nouvelle sur le front du chômage, tu es viré», dit une pancarte fixée sur le toit d’une voiture. D’autres affiches expriment leur aversion pour Obama et son gouvernement «communiste». Il y a un type affublé d’un T-shirt sur lequel le président américain est caricaturé en singe.

Un embouteillage monstre s’est formé sur la route 95 qui mène à Las Vegas, à 50 km au nord. Certains ont abandonné leurs voitures sur le bas-côté et se sont mis à marcher. Larry et Carla Verga, un couple de retraités et de «Tea Party Patriots» ( ce sont leurs T-shirts rouges qui le disent), claudique sur le bord de la route. Ils ont deux kilomètres à souffrir jusqu’à la carrière, mais pour rien au monde ils ne manqueraient le discours de Sarah Palin, leur idole, qui fait une apparition à midi. Larry et Carla ne sont pas riches, mais ils sont venus de Sacramento, la capitale californienne, en avion privé. «Nous sommes motivés», confirment-ils.

Pour eux, l’heure est grave. Lorsqu’on les lance sur les démocrates et sur Obama, ils se déchaînent. «Obama n’a pas été élu démocratiquement. Il a volé les votes en faisant inscrire, via l’organisation communiste Acorn, des milliers de sales clodos et de poivrots sur les listes électorales», affirme Larry sans ciller. «Il a aussi acheté les votes de parlementaires corrompus pour faire passer sa loi sur le système de santé. Il a donné 300 millions de dollars au gouverneur de Louisiane, affirme Carla. Obama a bâtardisé la Constitution. Il veut imposer le communisme. Pourquoi croyez-vous que les Tea Party sont en pleine frénésie, hein ?»

Les Verga sont convaincus que les membres des Tea Party sont les seuls citoyens conscients des intentions réelles du gouvernement. La tyrannie est à leurs portes : «Heureusement qu’on a Fox News, le seul média impartial. Je parie que les autres ne parleront même pas de l’événement d’aujourd’hui», gronde Larry.

Les banderoles accusant Harry Reid de diverses horreurs, dont celle d’être un «élitiste», se succèdent. Tandis que ses plus virulents détracteurs arpentent son village pour le lyncher verbalement, le sénateur déjeune à Las Vegas avec Wayne LaPierre, le président de la National Rifle Association. Le démocrate est en effet un supporteur du 2e amendement de la Constitution américaine, qui garantit le droit de porter une arme. «C’est loin d’être un élitiste, bien au contraire, déclare une employée de la station-service locale. Je ne suis pas d’accord avec sa politique, mais M. Reid est un voisin très simple et correct.»

Harry Reid Senior était un simple mineur de Searchlight. Son fils n’en est jamais vraiment parti. En retrait de la route 95, au bout d’un chemin de terre où sont garés deux 4×4 assurant sa sécurité (plusieurs parlementaires démocrates ont reçu des menaces récemment), sa maison est étonnamment modeste. Mais, sur le podium, Sarah Palin lance aux révoltés du Tea Party : «Reid est en train de jouer au casino avec votre avenir.»

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