Les déclarations faites au journal an-Nahar par le secrétaire d’État adjoint américain en charge du Proche-Orient, Jeffrey Feltman, au sujet des informations sur une livraison de missiles Scud au Hezbollah par la Syrie, ont été accueillies ces deux derniers jours avec indignation et un certain scepticisme par divers responsables du Hezbollah. Ces derniers ont principalement cherché à minimiser leur impact sur les décisions du parti, tout en évitant de confirmer et de démentir ces informations.
« Qu’ont donc à voir les États-Unis dans le fait de savoir si nous nous armons ou pas ? » s’est ainsi interrogé hier le secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem.
« Qui est habilité à déterminer à notre place la quantité et la capacité de notre armement ?
Cette question ne concerne que nous car nous défendons notre terre et notre dignité », a-t-il ajouté.
S’adressant à M. Feltman, il a dit : « Qui vous a chargé d’une tutelle sur le Liban et qui vous a dit que nous sommes préoccupés par votre inquiétude ? Savez-vous que les Libanais sont aujourd’hui plus tranquilles que jamais auparavant parce que vous êtes sortis du Liban, vous et ceux qui sont à vos côtés ? »
« Nous comprenons la douleur de Feltman car il a échoué pendant cinq ans dans sa tentative de transformer le Liban en une ferme américaine », a encore dit cheikh Kassem, ironisant aussi sur les propos du responsable américain au sujet du « sommet » tripartite tenu en février à Damas et qui avait regroupé les présidents iranien, Mahmoud Ahmadinejad, et syrien, Bachar el-Assad, ainsi que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. « Grâce à Dieu, nous avons appris que Feltman est inquiet des suites de cette rencontre tripartite. Cela veut dire que cette rencontre était positive et utile. Nous espérons que cette inquiétude se répandra dans chaque coin en Israël et chez tous ceux qui s’opposent à notre droit de récupérer notre terre et notre dignité », a-t-il dit.
« Un développement très, très dangereux »
Dans une interview publiée samedi par an-Nahar, M. Feltman avait tenu des propos sévères au sujet des informations sur le transfert de Scud au Hezbollah, tout en affirmant que l’administration américaine s’efforce toujours de confirmer l’authenticité de ces informations.
« Si elles se révèlent vraies, ce sera un développement très, très dangereux,et il nous faudra étudier tout ce qu’il est en notre mesure de faire pour renverser l’ordre des choses ou annuler (ce développement) », a-t-il dit.
« Nous devons traiter avec ce type de situation de façon très sérieuse. Fournir des armes à une organisation dont l’action est menée hors du cadre de l’État au Proche-Orient est une question essentielle, pas un détail, a poursuivi le responsable américain. Nous sommes inquiets à la suite des rapports qui nous sont parvenus. Nous sommes inquiets de l’arsenal dont dispose le Hezbollah et de ce qu’il signifie au plan de la stabilité dans la région, comme au plan de l’autorité de la loi et de l’État au Liban. Lorsqu’on entend le secrétaire général du Hezbollah, on constate qu’il reconnaît, ou plutôt qu’il se vante de posséder des dizaines de milliers de roquettes. Or ces dizaines de milliers de roquettes ne lui sont pas parvenues du ciel, mais d’un endroit bien déterminé, et lorsque ces armes franchissent la frontière libanaise, la résolution 1701 du Conseil de sécurité est violée. »
Au sujet de la rencontre tripartite de Damas, M. Feltman a d’abord souligné que celle-ci n’aide pas les efforts de l’administration américaine de dialoguer avec la Syrie. « Ceux qui nous reprochent d’être naïfs (avec la Syrie) ont trouvé une argument contre nous dans cette rencontre », a-t-il dit, en référence aux membres du Congrès américain qui s’opposent au dialogue avec Damas.
« Mais il y a autre chose aussi dans cette image (le « sommet de Damas »), a-t-il poursuivi. Si j’étais libanais, j’aurais trouvé cela inquiétant pour moi. Hassan Nasrallah n’est pas un chef d’État.
Nonobstant les désaccords entre nous et les présidents iranien et syrien, ce sont deux chefs d’État qui représentent leurs pays. Mais il y a un troisième homme qui est traité comme s’il était un chef d’État.
Et pour toute une catégorie de gens qui ont eu comme moi l’honneur de servir ou de vivre au Liban, c’est une chose très douloureuse de voir qu’Hassan Nasrallah est traité comme un chef d’État. »
« À ce sujet, je me demande ce que pensent certains milieux chrétiens qui avaient cru qu’en signant un accord avec le Hezbollah, leurs intérêts seraient sauvegardés et qui voient aujourd’hui que le président libanais, maronite de surcroît, est ignoré, alors même qu’un chef de milice est traité en chef d’État », a dit M. Feltman, dans une claire allusion au document d’entente signé en 2006 entre le CPL et le Hezbollah.
http://www.lorientlejour.com/category/Liban/article/655089/Le_Hezbollah_denie_aux_USA_tout_droit_de_regard_au_sujet_de_son_armement.html
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