Torture-Tainted CIA Official Leaves Agency … after Being Shown the Exit

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Pour polir l’image des états-Unis : Obama débush à la Cia

20-04-2010

La retraite anticipée de Stephen Kappes après un bilan noir en tant que chef des opérations de la Cia sonne comme la sanction contre un espion adepte des pires méthodes de torture qui mérite la Cour pénale internationale. En sacrifiant l’espion des prisons secrètes de l’agence, le Président Obama voudrait montrer qu’il tient encore les rênes d’une institution qui a perdu une bonne part de sa crédibilité. Par Momar DIENG

Stephen Kappes, puissant numéro 2 de la Cia, vient de quitter son poste. De son propre gré, précisent des sources proches de l’Agence de renseignements des Etats-Unis car il a demandé et obtenu une retraite anticipée. Pour d’autres observateurs dont ceux du site Voltaire qui a révélé la nouvelle, ce départ est comme une porte de sortie offerte à celui qui incarna, au plan opérationnel, les pires dérives de l’administration guerrière du Président Georges W. Bush. Mais en tout état de cause, ce maître-espion est définitivement cramé par la disgrâce. Le temps pour lui est venu de reprendre ses activités au sein de l’Armor Group, une officine de sécurité basée à Londres et dont il fut, jusqu’en 2007, vice-président exécutif.

Avec Stephen Kappes, expert en pathologie d’à peine 60 ans, homme aussi mystérieux que les secrets d’un milieu qu’il a intégré à l’âge de trente ans, on va de bavure en bavure, dans un «esprit criminel» tapi sur du velours, sans regrets. En 2004, il est, une première fois, sacrifié par le cartel néoconservateur de la Maison Blanche regroupé autour du duo officiel constitué par Donald Rumsfeld et Dick Cheney. En pleine turbulences après l’invasion de l’Irak par les Armées américaines et anglaises, l’Administration Bush, alors prise en flagrant délit de mensonges sur les fausses armes de destruction massive, fait le grand ménage à l’intérieur de la Cia. «Pour la patrie», elle ramène au service un ancien de Langley (siège de la Cia) devenu parlementaire républicain et dont le slogan guerrier est : recourir à chaque fois que de besoin «à la force mortelle, par exemple dans des cas appropriés contre les membres d’Al Qaïda planifiant des attaques contre les Etats-Unis».

Avant Al Qaïda, Porter Goss, c’est de lui dont il est question, a été impliqué dans tous les coups tordus de la Cia, notamment en Amérique Latine et du Sud. Le débarquement de contre-révolutionnaires cubains dans la Baie des Cochons contre Fidel Castro en avril 1961, il en était un des planificateurs. La traque meurtrière contre Ernesto Che Guevara, il y a vraisemblablement joué sa partition. La crise des missiles nucléaires soviétiques à Cuba à partir de 1962, il en fut également, rappellent des sources concordantes.

Mis en selle par les illuminés de l’Administration Bush, Goss liquida alors sans état d’âme tous les responsables opposés à l’affirmation de la ligne messianique du clan des Bush en les forçant à quitter l’agence. Parmi ses victimes, Stephen Kappes justement, mais également Michael Sulick, le tout-puissant chef des opérations clandestines. En particulier, le rôle dévolu à Porter Goss consistait à expulser de la Cia tous les responsables opérationnels qui avaient refusé d’apporter leur soutien à l’Administration Bush lors du scandale dit de l’uranium du Niger. En effet, pour valider la thèse des armes de destruction massive utilisée comme prétexte pour envahir l’Irak, Bush, Colin Powell et leurs amis avaient instrumentalisé la Central intelligency agency pour fabriquer de faux documents «prouvant» que Saddam Hussein avait importé de l’uranium du Niger pour ses noirs desseins. La supercherie «nigérienne» avait été superbement déconstruite par un diplomate courageux et indépendant, Joseph Wilson… ce qui contraindra plus tard le Général Powell, qui avait brandi avec fierté les faux documents devant le Conseil de sécurité des Nations unies quelques semaines avant l’expédition irakienne, à reconnaître avoir été «trompé». Le mal était déjà fait…

Mais tous ces événements ne font pas pour autant de Stephen Kappes un saint, si tant est que ce mot existe dans le milieu du renseignement. Porter Goss balayé de la tête de la Cia par ses patrons en 2006 au profit du Général Michael Hayden, Kappes revint par la grande porte pour devenir numéro deux de l’agence avant d’être confirmé par Léon Panetta, le successeur de l’intérimaire Hayden, à l’arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche. Comme on dit dans ce monde si hermétique, c’est un dur à cuire qui allait être responsable d’un nombre impressionnant de scandales émouvants mais restés impunis.

Kappes, où l’espion que Obama n’aimait pas

Kappes est en effet présenté comme un des exécutants opérationnels du programme de mise en place des prisons ambulantes de la Cia en dehors du territoire des Etats-Unis. Disséminées dans près de 70 pays dont ceux de l’ancien Bloc soviétique, en France, Allemagne, Grande Bretagne, Maroc et dans plusieurs pays africains, ces prisons de la Cia ont été répertoriées et dénoncées par les organisations des droits de l’Homme comme des lieux de torture utilisés par les Américains dans le cadre de la «lutte anti-terroriste» déclenchée après les événements du 11-Septembre. Et comme ce programme «spécial» contre les «terroristes» était en relation directe avec Guantanamo, Stephen Kappes avait également une influence déterminante sur la «gestion» infrahumaine des prisonniers parqués sur cette portion de territoire cubain.

Officier du corps prestigieux des Marines, spécialiste de la surveillance de l’évolution des capacités nucléaires de l’Iran depuis de nombreuses années, Kappes est aussi un soldat qui sait faire taire ses ennemis et indiquer le «bon chemin» à ses hommes. D’après plusieurs compte rendus de la presse américaine, c’est lui qui donna l’ordre de brûler vif Gul Rahman, un prisonnier capturé par la Cia en Afghanistan et dont il souhaitait cacher les tortures. Entre les montagnes d’Afghanistan et du Pakistan, Kappes et son fidèle compagnon Michael Sulick sont également exhibés comme les préconisateurs d’assassinats ciblés grâce à l’utilisation systématique de drones, ces avions sans pilote qui font apparemment plus de victimes civiles que de «combattants ennemis».

N’ayant pu fermer Guantanamo comme il l’avait promis en campagne électorale, le Président Barack Obama en sacrifie des symboles. Kappes en est l’un d’eux. Le célèbre espion a sans doute évité à la Maison Blanche un «dossier libyen» à l’instar du très douteux «dossier nucléaire iranien», car il semble que ce soit à lui que les Etats-Unis doivent le renoncement du Colonel Mouammar Kadhafi à des ambitions nucléaires, comme Jeune Afrique l’avait écrit en octobre 2006.

Et à lui aussi la mise au jour du rôle de l’ingénieur pakistanais Abdul Kadir Khan dans la dissémination de l’arme nucléaire dans certains pays. Mais Kappes a le malheur (bien mérité) de condenser, sur sa seule et unique personne, l’ensemble des détestations dont l’Amérique a été (avec justesse) la cible depuis septembre 2001. Sa dernière «tournée» a viré au drame. En «retournant» mal un djihadiste jordanien d’Al Qaïda, il réalisa en vrai l’histoire du loup dans la bergerie. Une fausse manœuvre qui permit à Khalil Al-Balawi de pénétrer à l’intérieur d’une base américaine en Afghanistan le corps plein d’explosifs. Bilan : une dizaine de morts dont des officiers de liaison de la Cia. C’était l’avant dernier jour de l’année dernière.

Pour remplacer Kappes, Obama a promu Michael Morrel, le numéro 3 de la Cia, un «intime» du Président Bush. Juste après les attentats du 11-Septembre, c’est Morrel qui d’après le site Voltaire, «informa le Président que ce n’était pas un petit avion, mais un gros porteur qui avait frappé la première Tour du World Trade Center. C’est également lui qui l’accompagna durant sa fuite et lui a présenta immédiatement un argumentaire pour accuser Oussama Ben Laden». En laissant ses stratèges du Pentagone et du Conseil national de sécurité (Nsc) débarquer cet homme «utile» d’un poste névralgique, Obama donne sans doute de nouveaux gages à ceux qui espèrent encore qu’il ne sera pas, quoi qu’il arrive, un bébé Bush aux mains du clan militaro-millénariste des Rumsfeld, Cheney et consorts. Dans ce pays où foisonnent par centaines de nouvelles milices étiquetées d’extrême-droite, rien n’est acquis d’avance, même la sacro-sainteté des lois et droits garantis par les pères de l’Indépendance. Georges W. Bush et ses patrons en ont donné une claire application pendant une presque décennie.

momar@lequotidien.sn

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