La vie éternelle des mégabanques américaines
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Pat Simon Johnson, ancien économiste en chef du FMI.
L’économie mondiale est confrontée à un sérieux problème : les plus grandes banques des Etats-Unis sont toujours “trop grandes pour faire faillite”. L’ampleur du problème a été reconnue non seulement par les autorités, mais également par les banquiers eux-mêmes. Jamie Dimon, l’influent PDG de JP Morgan Chase, estime que le temps du “trop grand pour faire faillite” est révolu.
Malheureusement, la solution préconisée par l’administration Obama pour remédier à la situation n’est pas une option viable. Le projet de réforme du secteur financier du sénateur Christopher Dodd, actuellement débattu au Sénat, prévoit la création d’un processus de “résolution”, sous forme d’une agence gouvernementale ayant les capacités juridiques pour gérer une faillite ordonnée. Les partisans du projet font valoir que cette approche s’appuie sur le succès de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), qui a un long historique de fermetures de banques de petite et moyenne taille. Dans ce contexte, le processus de “résolution” pour une banque signifie le limogeage de ses dirigeants, la dissolution des actionnaires et des pertes pour les créanciers non assurés. C’est essentiellement une forme de banqueroute, avec un peu plus de discrétion !
Mais la mise en oeuvre de ce mécanisme, apparemment parfait, présente dans la pratique une difficulté insurmontable pour les grandes institutions. Imaginez-vous le moment critique où une décision doit être prise concernant la faillite possible d’une mégabanque, comme JP Morgan Chase, dont les actifs s’élèvent à près de 2.000 milliards de dollars. Vous êtes un décideur de haut niveau ; vous êtes armé avec le processus de “résolution” Dodd et vous entamez la réunion, bien décidé à ne pas venir en aide à la banque en difficulté. A ce moment-là, quelqu’un vous rappelle que JP Morgan Chase est une complexe institution financière mondiale. Le dispositif Dodd détermine les conditions d’une reprise aux Etats-Unis seulement et non pas dans les dizaines d’autres pays où opèrent des filiales ou autres entités. Ces dernières seront alors promises à une banqueroute pure et simple, pour laquelle les différents gouvernements tenteraient de trouver des solutions improvisées.
Les conséquences de ces réactions non coordonnées seraient effrayantes et à la limite du chaos. C’est exactement ce qui s’est produit pour Lehman Brothers. L’existence d’un processus de “résolution” ne contribue en rien à limiter les dégâts ou la panique. Une faillite de ce genre pourrait être gérée de manière plus ordonnée par le biais d’une autorité de réglementation transnationale. Mais aucun mécanisme de ce genre n’existe, ni n’existera dans un avenir prévisible. Les décideurs des autres pays du G20 sont très clairs sur ce point : personne ne conviendra a priori d’une manière spécifique de gérer la faillite d’une grande banque mondiale.
Au moment où JP Morgan Chase, ou n’importe laquelle des six principales banques américaines, fera faillite, la même question qu’en septembre 2008 se posera : viendrez-vous à l’aide de cette banque ou la laisserez-vous faire faillite ? Sauter le pas ou prendre du recul, le temps de trouver une solution pour sauver le système sur fonds publics ? Il est plus que probable que la seconde solution prévale. Quand rien ne va plus, il est beaucoup moins effrayant de sauver une mégabanque que de la laisser sombrer. Et bien sûr, les marchés du crédit le savent, raison pour laquelle ils prêtent à un taux moins élevé à JP Morgan Chase et aux autres grandes banques qu’aux banques plus petites qui, elles, peuvent vraiment faire faillite. Les grandes banques peuvent ainsi devenir plus grandes encore. Et plus elles sont grandes, plus les créanciers sont en sécurité. Et plus les conséquences globales seront catastrophiques.
Simon Johnson
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