America on a Diet

Edited by Amy Wong

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Il n’y a pas qu’à la Maison Blanche de Michelle Obama qu’on est au régime basses calories. Dans tout le pays, on se serre la ceinture. On ferme, on coupe, on supprime. Il y a dix ans, l’Amérique ne cessait de voir plus grand. Super size était le menu du jour. Aujourd’hui, tout rétrécit avec la même soudaineté. Les voitures, les maisons, les administrations…

La faute aux déficits. Dans sa dernière édition, Newsweek claironne “America is back”. L’Amérique est de retour. “Pour digérer les échecs, et se saisir des innovations, les Etats-Unis restent champions du monde”, s’écrie l’hebdomadaire, en vantant une convalescence plus rapide qu’ailleurs. C’est peut-être vrai à Wall Street. Mais au niveau des Etats, c’est la dèche. Les aides fédérales, incluses dans le plan de relance de février 2009, commencent à être épuisées. Plusieurs Etats, dont le New Jersey, n’ont masqué les déficits qu’au prix d’acrobaties comptables. Certains économistes vont jusqu’à agiter le spectre de la Grèce.

La Californie accuse un déficit de 56 % de son budget et elle consomme trois fois plus d’énergie qu’elle n’en produit (l’analyste Gregor MacDonald a remarqué que les Etats les plus mal en point sont justement ceux où le décalage entre énergie produite et consommée est le plus grand). Dans l’Illinois, l’Etat de Barack Obama, la dette atteint 41 % du budget, causée pour une large part par l’assurance-santé et les retraites des personnes âgées. La Floride, qui est l’un des sept Etats sans impôt sur le revenu, projette un déficit de 2,6 milliards pour 2011. Le gouverneur, un républicain modéré, est en passe d’être chassé de la course par un adversaire qui s’est fait le champion des Tea Parties…

Les Etats les plus touchés par la crise sont étranglés par un corset fiscal qui leur interdit d’augmenter les impôts. Au temps de la prospérité, les activistes antigouvernement avaient réussi à faire passer des mesures imposant la redistribution des excédents. Maintenant, les gouverneurs sont obligés de ferrailler avec les assemblées locales, sachant qu’augmenter les impôts est devenu une forme de suicide électoral. L’Oregon est l’un des seuls à avoir franchi le pas et adopté l’idée farfelue de faire payer les riches. En janvier, les électeurs ont approuvé une augmentation de l’impôt sur les hauts salaires et les grandes entreprises. Il y avait urgence : des centaines d’écoles avaient ramené la semaine à quatre jours. Plus d’argent, plus de cours le lundi.

L’Amérique gère la crise à sa manière : sans faire de quartiers, mais avec beaucoup de créativité. Dans le Missouri, on taxe les ambulances ; à New York, ce sont les limousines. L’Arizona a hypothéqué la résidence du gouverneur. La Californie a ordonné aux entreprises de payer leurs impôts d’avance. La Chambre des représentants du Colorado a adopté un amendement supprimant le Sénat (lequel y a mis son veto, comme on s’en doute). A Denver, un groupe de citoyens a proposé de faire fondre l’or qui recouvre le dôme du Capitole.

Solution à la crise : le gouvernement allégé. Les 35 heures obligatoires, en quelque sorte, mais non payées. Ici, les bibliothèques ferment un jour par semaine. Là, ce sont les tribunaux. Dans le Vermont, le président de la Cour suprême a décrété une demi-journée de loisirs par semaine.

Dans l’Oklahoma, 4 600 gardiens de prison ont pris douze jours de vacances forcées. Selon la Conférence nationale des assemblées locales, la moitié des administrations ont déjà eu recours au chômage technique (“furlough”). Les chiffres des licenciements sont tout aussi impressionnants : près de 200 000 fonctionnaires licenciés depuis août 2008, alors que leurs services n’ont jamais été autant sollicités.

Selon le Center on Budget Policy and Priorities, un organisme d’études de Washington, quarante-cinq Etats ont réduit les services sociaux depuis le début de la récession. Aucune amélioration n’est prévue pour 2011, à voir les budgets que viennent de présenter les gouverneurs. Des coupes sont prévues dans les services médicaux aux prisonniers, aux enfants défavorisés, aux malades mentaux, dans les subventions aux crèches, au transport scolaire… “Nous allons devoir prendre du recul et trouver de nouveaux modèles économiques pour les services que nous apportons”, a résumé Raymond Scheppach, le directeur de l’Association nationale des gouverneurs.

Le secteur qui souffre le plus est l’éducation. Le ministre de l’éducation estime que de 100 000 à 300 000 professeurs sont menacés de licenciement à la rentrée, si rien n’est fait. Au cours de la deuxième semaine d’avril, le sénateur démocrate Tom Harkin a proposé un plan de sauvetage de 23 milliards pour les écoles à l’image du bail out de 2008 pour les banques : “Gardons nos enseignants au travail”, c’est le nom du projet de loi.

Dans les cafétérias des universités, on a commencé à supprimer les plateaux-repas. Sans plateaux, pas d’empilement d’assiettes. Moins de nettoyage, moins d’eau, moins de calories, moins de frais. Plus d’une centaine d’universités ont déjà pris cette mesure. Certaines ne l’ont introduite que progressivement, ce qui, avec l’inimitable sens américain de la com’, se traduit par l’instauration de Trayless Tuesdays : les “mardis sans plateaux”. Le mercredi, au diable les déficits, on peut de nouveau s’empiffrer.

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