Arizona : La paranoïa anti-Obama se déchaîne
Par Jean Sébastien Stehli le 4 mai 2010 18h00 | 20 Commentaires
La semaine dernière, le gouverneur d’Arizona a signé une loi anti immigrants dont les conséquences directes ou indirectes n’ont pas fini de se faire entendre. Désormais, sur simple soupçon raisonnable (comprenez peau basanée) d’illégalité, toute personne pourra voir vérifiée son identité. Mais cette loi, qui ne fait pas honneur à l’Etat de John McCain, cache en réalité autre chose de grave.
L’Amérique ne tourne plus rond. Cette loi contraire à tous les principes des Etats-Unis et préparée en toute hâte alors que Barack Obama et le Congrès travaillent à une nouvelle loi sur l’immigration, fait partie d’un mouvement plus vaste. Ce mouvement s’appelle “Take Back America”, “Reprenons l’Amérique”. Question : Reprendre l’Amérique à qui ? Quel ennemi a fait main basse sur le pays ? Poser la question c’est y répondre. Pour toute la frange d’extrême droite, tous ceux qui ne sont pas de souche WASP (White Anglo saxon protestant), sont des infidèles qui n’ont aucune légitimité à vivre aux Etats-Unis. Pour mettre les points sur les i, l’usurpateur, c’est Barack Obama, selon ces “bigots”, avec un phénomène accélérateur qui est l’évolution démographique des Etats-Unis. En Californie, les “whites” ne constituent déjà plus une majorité. Et ce n’est que le début de cette tendance.
Le mouvement “Take America Back” a, comme par hasard, commencé à pointer le bout de son nez avec l’élection de Barack Obama, le premier président noir. Les mêmes qui demandent que les Latinos produisent leurs papiers, exigent que le président prouve qu’il est bien né aux Etats-Unis. Parce que s’il est né à l’étranger, il ne peut pas occuper la Maison Blanche. Rush Limbaugh, l’inénarrable animateur d’un talk show écouté par des millions de fidèles aux Etats-Unis, a d’ailleurs révélé l’état d’esprit de sa clique : “Je peux comprendre qu’Obama soit un peu sensible à l’idée de montrer ses papiers. Il a sans doute peur que qu’on lui demande de produire les siens.”
Limbaugh, Glenn Beck et d’autres – les mêmes qui croient que la fin du monde est pour 2020, ou que le gouvernement insère des puces électroniques sous la peau des citoyens pour mieux les surveiller – affirment que Barack Obama, dont le père était Kenyan et qui a vécu en Indonésie, ne serait pas né sur le sol américain. Et même lorsque le président a produit son certificat de naissance, certains ont expliqué qu’il s’agissait d’un faux. La haine du président est si forte que le sénat de l’Arizona a voté, dans la foulée de sa loi sur l’immigration, une loi obligeant tout candidat à l’élection présidentielle de 2012, de produire un certificat de naissance. L’idée était tellement grotesque qu’à peine votée par 31 des 35 sénateurs ayant approuvé la loi anti immigration, qu’elle a été retirée.
L’Arizona fait tache d’huile. Dix autres Etats, certains loin de la frontière avec le Mexique (comme le Nebraska, l’Ohio ou le Maryland), préparent également des lois anti immigration. Et John McCain, qui, dans le passé, avait pris des décisions courageuses sur l’immigration, cette fois-ci a approuvé la loi dans l’espoir de ne pas perdre son siège. Il est vrai qu’il est menacé par un novice, partisan de la thèse selon laquelle Obama n’est pas né aux Etats-Unis, soutenu par le Tea Party. Pour J.D. Hayworth, la campagne pour le siège de Sénateur de l’Arizona est une opportunité de “défendre notre culture”. Pas besoin de traduction.
Le plus triste, une fois de plus, est qu’aucune voix du Parti Républicain ne s’élève pour condamner de tels propos. Le Tea Party entraînera, cela ne fait aucun doute, le GOP dans sa chute lorsqu’elle ne manquera pas de se produire. Cette attitude anti immigrants est un suicide politique : les Latinos sont en passe de devenir l’un des principaux groupe d’électeurs. Ils avaient assuré la victoire de George W. Bush en 2000. Ils pourraient bien assurer la réélection de 44th dans deux ans.
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