Dangerous Delusions about the United States’ Fiscal Health

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La Grèce, l’Espagne, le Portugal, l’Irlande et même, comme c’était prévisible, l’Angleterre. Tous les jours, ces pays sont attaqués, conspués par les grands stratèges de ce monde et soumis à un examen approfondi et permanent de leurs faiblesses principales, le déficit et la dette. La zone euro est boudée par les investisseurs. L’euro aussi. Malgré le plan de relance européen, il ne rebondit pas et attend une hypothétique intervention concertée des banques centrales pour arrêter de baisser. Le Japon lui non plus ne trouve pas grâce aux yeux des investisseurs. Certes, son endettement a atteint le niveau, en pourcentage du PIB, de celui du Zimbabwe et du Liban, mais on oublie que le niveau de l’épargne des ménages japonais couvre largement les besoins de financement de l’Etat.

Et vers qui se tourne-t-on pour trouver refuge ? Quel est le pays qui serait le bon élève et qui bénéficie aujourd’hui d’une totale impunité aux yeux des investisseurs ? Les Etats-Unis ! C’est un comble, non ? Le dollar est même devenu depuis quelques semaines une valeur refuge. On vend l’euro pour acheter du dollar, on vend la livre sterling pour acheter du dollar, on vend du yen pour acheter du dollar. Et les obligations ­américaines, grâce à un ­triple A, aussi ­mérité que celui que donnaient allègrement les agences de notation aux armes de destruction massive qu’étaient les subprimes, continuent à attirer des investisseurs aveuglés par leur vision hollywoodienne des Etats-Unis. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Tous les économistes reconnaissent que la situation budgétaire des Etats-Unis n’est pas brillante. Le déficit ­primaire (qui exclut les intérêts de la ­dette) du pays, comme le signale le journal suisse Le Temps, est à 7,3% du PIB contre 6% pour la Grèce. La dette elle-même n’a rien de rassurant. La dette officielle et surtout la dette réelle, celle qui tient compte des ­engagements “hors bilan” comme les garanties apportées aux agences hypothécaires américaines dont l’hémorragie ne faiblit pas.

Alors pourquoi ce régime de faveur pour les Etats-Unis et le dollar ? L’argument est simple : “les Etats-Unis ont un déficit et une dette dramatiques mais c’est un pays qui sait rebondir et générer de la croissance.” Mais cette vision de l’Amérique battante qui rebondit est très datée et un peu dépassée. Elle est très “années 80”. Or, les Américains de 2010 n’ont rien à voir avec ceux qui ont élu Ronald Reagan. Ils lorgnent de plus en plus vers le modèle social européen, ils sont plus vieux, plus inquiets, moins entreprenants, ils veulent de la sécurité et ils commencent à privilégier l’épargne à la surconsommation. Les héros sont fatigués et c’est probablement Michael Moore qui tournera le prochain Rambo.

Certes, les prévisions de croissance pour les Etats-Unis sont largement supérieures à celles de l’Europe. Mais cela ne suffira pas à les sauver d’un problème majeur de refinancement de leur dette. Ce n’est pas 3% de croissance qu’il leur faut pour compenser l’effet dévastateur de la crise des “subprimes” mais 5% à 6% et ce, pendant quatre à cinq ans d’affilée. Même dans cette hypothèse, l’endettement continuera à progresser car les Américains veulent un Etat providence.

Les marchés, les “hedge funds”, les investisseurs ne veulent pas encore voir la réalité en face. Ils préfèrent pour le moment s’attaquer à des cibles plus évidentes. Mais la hausse du dollar est une aberration. De même que le niveau des taux longs américains. Et l’histoire financière nous a prouvé que les arbres ne montent pas au ciel et que les bulles finissent toujours par éclater. Quand ? Le timing est impossible à déterminer. Mais le jour où les investisseurs ôteront leurs lunettes américaines roses en 3D, il faudra courir aux abris et l’euro deviendra ce jour-là une valeur refuge. Ne souriez pas. Vous verrez. Ce n’est qu’une question de mois, voire de semaines…

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