BP ou le dilemme des pétroliers
La tragédie de la marée noire en Louisiane met en lumière les manquements d’une entreprise présentée il y a quelques années comme la plus verte de l’industrie pétrolière. Du milieu des années 1990 au milieu des années 2000, BP a souhaité bouleverser le monde pétrolier. Rebaptisée Beyond Petroleum («Au-delà du pétrole») après la fusion avec Amoco en 1998, la compagnie veut faire de l’exploitation des hydrocarbures une industrie propre.Sous la direction de John Browne, la compagnie basée à Londres devient le fer de lance de ce qu’on nomme la responsabilité sociale des entreprises. BP collabore ainsi avec la Banque mondiale, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement et des organisations non gouvernementales, comme Amnesty International ou le WWF Turquie, pour mettre en œuvre l’oléoduc le plus vert possible. L’entreprise anglo-saxonne apparaît alors comme le modèle à suivre.Mais le départ de John Browne en 2007 sonne le glas de cette politique. Tony Hayward, ancien directeur financier de l’entreprise, lui succède alors. L’une de ses premières décisions est de focaliser BP sur le cœur de métier, à savoir la production de pétrole et de gaz, et de mettre entre parenthèses l’engagement social et environnemental de la société. Constatant que la compagnie, après avoir talonné ExxonMobil comme major de l’industrie, a rétrogradé à la quatrième place, il décide une réduction massive des coûts.Mais, en voulant maximiser ses profits et rattraper son retard sur les autres majors, BP a sacrifié ce qui devrait être son souci numéro 1: la sûreté. Le projet Deep Water Horizon dans le golfe du Mexique devait incarner le retour en force de la compagnie anglo-saxonne: à partir de cette plateforme, BP avait réalisé le forage le plus profond de l’histoire pétrolière, à plus de 10 000 mètres de fond. Ce sera le symbole de l’échec de la nouvelle stratégie. Selon les premiers témoignages des techniciens travaillant sur cette plateforme, BP demandait depuis plusieurs semaines une accélération de la production alors que Transocean, propriétaire de l’infrastructure, suggérait une pause.
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