Financial Regulation: Is Europe Shooting Itself in the Foot?

Edited Piotr Bielinski

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Régulation financière : l’Europe se tire-t-elle une balle dans le pied ?

Le Parlement européen a adopté hier définitivement le texte sur le plafonnement des bonus des banquiers. A priori, c’est une bonne nouvelle : cette affaire du bonus des traders et des dirigeants de banques (rémunération complémentaire et variable) montre que l’Europe, qu’on dit souvent immobile, avance. Mais elle permet aussi de constater que les bonnes intentions peuvent avoir des conséquences inattendues et peut-être risquées.

Le Parlement européen a voté hier un texte qui, sur les bonus, va assez loin. Dès le 1er janvier, les banquiers ne pourront plus toucher plus de 30% de leur bonus en cash (voire même 20% quand ils sont très élevés) et le versement de 40% à 60% de la rémunération variable totale sera différée dans le temps – entre trois et cinq ans. Ce qu’il faut retenir, c’est que les opérateurs sur les marchés financiers, rémunérés au bonus de fin d’année, ne toucheront plus grand chose tout de suite et en argent, mais une partie en actions et plus tard.

Il ne s’agit pas de pleurer sur ces salariés qui gagnent souvent des fortunes extravagantes. Le Parlement européen a d’ailleurs fixé un objectif tout à fait louable à ce texte : mettre fin aux prises de risques excessives nées de l’appât du gain. On le sait, la distribution de bonus énormes a un rôle dans la crise. Mais la question est de savoir si l’Europe ne se tire pas une balle dans le pied avec des normes dont la presse anglo-saxonne reconnaît qu’elles sont les plus contraignantes au monde. Plus dures que ce que recommandait le G20. Plus dures que ce qu’ont décidé les Etats-Unis. Il y a un paradoxe à voir que l’Europe va plus loin et plus vite que les autres alors que la crise est d’origine américaine, que ses premiers responsables sont les banques d’investissement américaines, la Réserve fédérale américaine et les régulateurs américains.

Barack Obama a fait voter une grande réforme financière, dont on a beaucoup parlé en Europe et à juste titre. Mais il faut savoir qu’elle n’est pas extrêmement précise, elle prévoit surtout des principes généraux (des « guidelines ») qui seront déclinés ensuite par des règlements divers et variés avec toutes les marges d’interprétation possibles. C’est, bien au-delà du sujet des bonus, il ne faut se le cacher, ce qui inquiète le plus les banques européennes. Le point à ne pas perdre de vue est de fait qu’il existe une concurrence féroce entre les banques et qu’une faille du dispositif fait que les succursales des banques américaines en Europe pourraient bien appliquer les règles américaines. Les banques françaises, allemandes, britanniques, craignent du coup une fuite de leurs équipes.

On peut espérer que le législateur américain, singapourien ou de Hong Kong, touché par la Grâce, suive l’Europe ! Ou que le changement des mentalités se fasse réellement partout. Sinon, il y aura du mouvement et les européens perdront de l’activité financière (utile aussi). Chacun a son avis sur la question, mais cet épisode fait prendre conscience que rien n’est neutre y compris dans la régulation. Quand il s’agit des banques, encore faut-il savoir que les banques occupent une place bien plus importante dans le financement de l’économie en Europe continentale qu’aux Etats-Unis, où les entreprises se financent directement sur les marchés. La régulation bancaire ne les touche pas de la même manière. L’Europe doit naturellement être à la pointe de la régulation. Mais pas naïve.

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