Afghanistan: “A Timetable for Withdrawal Will Be Difficult to Stick to”

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Pour Karim Pakzad, chercheur associé à l’Institut de Relations internationales et Stratégiques (IRIS), le fait pour les forces afghanes d’assurer la sécurité du pays à l’horizon 2014 est peu réaliste.

Comment doit-on interpréter le fait que cette conférence se tienne à Kaboul alors que jusqu’à présent ce type de réunion se tenait en Occident (Paris, Londres…) ?

– Après une période de tension entre l’administration américaine et Hamid Karzaï avant et après l’élection frauduleuse de ce dernier en août 2009, les Etats-Unis se sont rendus compte qu’ils n’ont pas d’autres choix que soutenir le président afghan. Cette conférence à Kaboul est destinée à renforcer le pouvoir d’Harmid Karzaï. Le fait même de réunir une telle conférence à Kaboul est un succès politique pour lui.

Est-ce une façon de mettre les talibans devant le fait accompli ? Et les contraindre donc à négocier avec l’administration Karzaï malgré la présence des forces de la coalition ?

– Oui, cette conférence est également un soutien apporté par les Etats-Unis et ses alliés au plan d’Harmid Karzaï qui consiste à négocier avec les talibans. Mais rien ne dit que cette démonstration peut contraindre les talibans à négocier. Si des progrès étaient obtenus dans ce sens, ce serait le résultat de la visite le 18 et 19 juillet d’Hillary Clinton à Islamabad, qui a une réelle influence sur les talibans.

La communauté internationale soutient le calendrier de montée en puissance de l’armée et de la police afghane d’ici à la fin 20014. Barack Obama a, de son côté, fixé à juillet 2011 le début du retrait des troupes américaines. Est-ce envisageable ?

– Le calendrier de retrait sera difficile à tenir. La corruption gangrène toujours l’Afghanistan, la bonne gouvernance est loin d’être une réalité et ils ne sont pas nombreux ceux qui croient que les forces de sécurité afghanes, 135.000 aujourd’hui contre 140.000 soldats de l’OTAN, seront capables d’assurer la sécurité du pays, sauf si par miracle les négociations avec les talibans ou avec une partie importante de ces derniers s’engagent vraiment d’ici 2014.

Harmid Karzaï est pressé par la communauté internationale d’adopter des mesures constitutionnelles concrètes “sur la manière d’améliorer la bonne gouvernance”. En a-t-il les moyens ?

– D’abord, il n’existe pas une approche commune sur ce point. Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon demande au gouvernement afghan d’adopter des mesures concrètes dans ce domaine alors que la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton pense que le gouvernement de Kaboul “s’est doté d’outils contre la corruption et le népotisme”.

Personnellement je pense que le président afghan, même doté de bonne intention dans ce domaine, ne peut changer fondamentalement les choses sans une administration efficace, crédible et non corrompue. Pour gouverner, Harmid Karzaï est toujours l’otage de ses alliances contradictoires et le pouvoir est partagé en grande partie selon des compromis politiques avec ses alliés et non sur de critère de compétence et d’efficacité.

La question du détournement de l’aide internationale a été également au cœur de la Conférence ? La corruption est-elle toujours aussi vivace en Afghanistan ?

– Oui, la corruption et le détournement de l’aide étrangère existent toujours en Afghanistan et profitent à une petite minorité autour du pouvoir ou à des personnes liées à de hauts dirigeants afghans qui ont mis la main sur des entreprises d’Etat et qui ont parfois le monopole des contrats avec des donateurs internationaux. Officiellement, un million de dollars par jour quitte l’Afghanistan vers les banques des pays du golf persique. A cela s’ajoute la corruption “ordinaire” des fonctionnaires, des policiers, des juges .. souvent parce que leur salaire ne leur permet pas de vivre décemment.

Interview de Karim Pakzad, chercheur associé à l’Institut de Relations internationales et Stratégiques (IRIS), par Benjamin Harroch – Nouvelobs.com

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