Un moment historique. Barack Obama a abrogé mercredi la règle imposant aux militaires américains de ne pas révéler leur orientation sexuelle.
L’homme sur la photo s’appelle Daniel Choi. Il est né en 1981 et a servi dans l’armée des Etats-Unis notamment lors de la guerre en Irak au grade d’officier d’infanterie. Diplômé de West Point en 2003, transféré à l’Armée de service actif à la Garde nationale de New York en juin 2009, puis à la Garde nationale du premier Bataillon du 69e d’Infanterie basé à Manhattan, il avait pourtant été révoqué de l’armée US pour avoir enfreint le règlement de 1993 intitulé «Don’t ask, don’t tell», qui permettait aux homosexuels d’intégrer les rangs de l’armée à condition de ne jamais évoquer leurs préférences sexuelles. En mars 2009, ce soldat émérite a eu le tort de faire son coming-out sur l’antenne du «Rachel Maddow Show» et malgré une pétition signée par plus de 150000 personnes, sa carrière militaire a été stoppée net par un panel d’officiers de la Garde nationale de New York, qui ont respecté le règlement à la lettre.
Daniel Choi, qui a quitté l’armée définitivement le 29 juin 2010, est depuis devenu un activiste de la cause des droits des lesbiens et homosexuels. Dans une lettre ouverte adressée au président des Etats-Unis, Barack Obama et au Congrès américain, il écrivait en mai 2009 que la politique «Don’t ask, don’t tell» était «une gifle». Pour lui, mais aussi «aux visages des soldats (…) qui ont démontré qu’une unité d’infanterie pouvait être assez professionnel pour accepter la diversité et des leaders capables d’accepter des soldats qualifiés de tous horizons sexuels». Le 18 mars dernier, Daniel Choi et un autre officier révoqué, le capitaine Jim Pietrangelo se sont menottés volontairement à l’entrée de la Maison blanche. Ils ont aussi tenu une grève de la faim de sept jours en mai dernier, pour que Barack Obama tienne l’une de ses promesses de campagne et accélère la réforme du code militaire. Leur combat n’a pas été vain.
Un symbole
Mercredi, à Washington, quatre jours après avoir obtenu le feu vert du Congrès, le président des Etats-Unis a signé l’abrogation de la règle et ce malgré les nombreuses oppositions au sein même du Pentagone. De nouvelles dispositions vont être établies pour permettre aux homosexuels de servir dans les rangs de l’armée américaine, sans devoir cacher leur orientation sexuelle. Pour Aaron Belkin, directeur du Palm Center, centre de réflexion au sein de l’Université de Californie, à Santa Barbara, cité par Reuters, le Pentagone va volontairement ralentir la réforme. «Le secrétaire à la Défense et les responsables militaires se sont jusqu’à présent comportés comme si l’abrogation (de la règle) leur posait un problème compliqué. Ils vont certainement demander un an pour pouvoir expliquer aux troupes comment aborder l’homosexualité, estime-t-il. C’est une obstruction politique de la part des responsables militaires. Le coeur de l’affaire, c’est que l’armée pourrait supprimer cette règle dès demain si elle le souhaitait, mais ce ne sera pas le cas», a-t-il ajouté.
Depuis 1993, plus de 13 000 soldats ont été renvoyés sur application de la loi «Don’t ask, don’t tell». La Cour des comptes américaine (GAO) estime que ces révocations ont coûté près de 200 millions de dollars au contribuable en frais de recrutement et de formation. Mais selon des chiffres rendus publics par le Pentagone en février dernier, le nombre de soldats renvoyés de l’armée à cause de leur homosexualité est en repli ces dernières années : 428 soldats ont ainsi été renvoyés en 2009 –259 hommes et 169 femmes–, soit une baisse de 30% par rapport à l’année précédente. Au-delà des chiffres et des calculs politiciens, était en jeu un symbole. Daniel Choi pouvait bien laisser couler des larmes de joie : il a remporté la bataille la plus importante de sa vie.
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