(Québec) Les Américains sont sous le choc. Une nouvelle fois, le geste insensé d’un citoyen sans antécédents connus de violence provoque stupeur et consternation. Parmi sa vingtaine de victimes, une enfant de neuf ans et un juge, tués sur le coup. Point de mire vraisemblable de ce carnage, la représentante démocrate du huitième district d’Arizona, Gabrielle Giffords, qui, elle, lutte actuellement pour sa vie aux soins intensifs.
Comme à chacune de ces tueries, des questions sans réponse. Pourquoi semer ainsi aveuglément la mort? Qu’est-ce qui aurait pu empêcher cela?
Et en réponses, les mêmes hypothèses. Le meurtrier présumé, Jared Lee Loughner, est un homme malade dont on a mal évalué la dangerosité et qui n’a donc pas reçu les soins que nécessitait son état.
Il y a aussi l’accès aux armes à feu facile chez nos voisins, où le droit de posséder et de porter une arme est protégé en vertu du deuxième amendement de la Constitution. Et les Américains ne s’en privent pas, avec 200 millions d’armes en circulation pour 300 millions d’habitants.
Également relevée par les analystes, la violence verbale tolérée dans le discours public. Puisqu’il y a cette fois une élue au coeur de l’affaire, on relève plus particulièrement la rhétorique incendiaire alimentant le discours partisan entre républicains et démocrates.
Pour illustrer ces dérapages, une large majorité de commentateurs ont relevé la page Facebook de l’égérie du Tea Party, l’ex-gouverneure de l’Alaska Sarah Palin, qui a utilisé des mires de fusil pour identifier les candidats démocrates dont il fallait selon elle se débarrasser en priorité lors des élections de mi-mandat.
«Ne battez pas en retraite, rechargez!», écrivait-elle dans une métaphore guerrière d’un goût douteux.
Sarah Palin n’est évidemment pas responsable de la mort de six de ses compatriotes et des blessures graves infligées aux autres victimes. Mais elle partage avec tous ceux qui abusent du discours public – il y a des démocrates et des républicains dans le lot, comme des Québécois de toutes convictions d’ailleurs – la responsabilité de créer un climat malsain. Un environnement qui peut laisser croire à certains esprits dérangés qu’il leur revient de régler le «problème» – et du même coup calmer leurs angoisses – en interprétant les attaques partisanes excessives comme des ordres de mission.
En fait, tous ceux dont les écrits ou les propos sont diffusés dans les médias ou rendus accessibles par la technologie devraient être guidés par le principe de précaution. Les métaphores violentes peuvent malheureusement être interprétées par certains au pied de la lettre.
Aussi, pour convaincre, est-il plus sage, pour ceux qui sont capables de le faire, de développer un argumentaire solide tout en évitant en support les images-chocs à l’interprétation équivoque. Dans les autres cas, il n’y a pas d’autre choix que de dénoncer les dérapages, tout en protégeant la liberté d’expression. La politique et les citoyens ne s’en porteront que mieux.
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