Edited by Drue Fergison
Je suis un fou de radio. Je suis un fan de National Public Radio (NPR).
Si vous comprenez l’anglais, allez écouter NPR sur internet. Les programmes de cette chaîne publique américaine de radio sont excellents. Ses deux grands journaux (Morning Edition, le matin et All Things Considered, le soir) sont des modèles de qualité: sans jingle trépidant, sans artifice, des vraies voix de radio communiquent et expliquent l’information nationale et internationale. Les reportages et les invités sont généralement très bons. Les programmes culturels sont riches, distrayants et surtout ne sont pas prétentieux et intellectualistes (suivez mon regard).
La place laissée à l’information de qualité (je ne parle pas du sport ou de la météo) sur les ondes des radios privées américaines est désormais réduite à presque rien. Sans NPR, la radio américaine serait tronquée.
Juste un petit problème: NPR souffre du défaut dont souffrent tous les grands médias américains à l’exception de Fox News, du Wall Street Journal et de USA Today. Généralement et de manière subtile, l’information est analysée par des journalistes presque exclusivement pro-démocrates.
Ce qui rend ce “biais” encore plus pénible pour l’auditeur qui ne se reconnait pas systématiquement dans les positions du Parti Démocrate, est l’air souvent supérieur et méprisant des élites qui hors antenne défendent NPR. Combien de dîners et de cocktail à Washington ai-je dû supporter, durant lesquels ces démocrates admirateurs de la France m’expliquaient que “l’Amérique profonde est inculte, c’est pour ça qu’elle vote républicain” ?
Je suis choqué que l’on puisse penser que ceux qui ne pensent pas comme vous sont par définition des abrutis, fanatiques, qui font passer leur idéologie libérale ou leur conviction religieuse, avant tout raisonnement. Cette dictature de la pensée unique démocrate est insupportable. La nouvelle majorité républicaine de la Chambre des représentants ne la supporte plus. Un des dirigeants de NPR vient de démissionner: il a été pris par une caméra cachée en train de qualifier de fanatiques obscurantistes les élus du Tea Party. Dans la foulée la directrice de NPR a dû également démissionner.
Le débat politique démocratique suppose que l’on échange des points de vue, que l’on cherche des solutions et que l’on accepte que la majorité informée des électeurs mérite de trancher.
Que faire si la majorité n’est pas bien informée ? Réponse: liberté de la presse. L’électeur a de droit et le devoir de lire, d’écouter et regarder plusieurs sources d’information pour se faire une idée. En lisant mon blog en ce moment, vous ne cherchez pas LA vérité. Vous cherchez VOTRE vérité. Vous vous faites une opinion.
Les républicains de la Chambre viennent donc de voter une loi qui interdit aux quelque 800 stations de radio qui dépendent d’universités ou d’États, d’utiliser des fonds fédéraux pour acheter les programmes de NPR. L’économie pour l’Oncle Sam est misérable: 60 petits millions de dollars. L’objectif réel des républicains n’est pas l’économie budgétaire. Il s’agit de mettre fin aux subventions publiques d’un organisme qui à leurs yeux a pour objectif de perpétrer la domination des idées démocrates: plus d’impôts, plus de rôle de l’État dans la vie des citoyens.
Ce qui rend ce débat intéressant et complexe est que seulement 2% du budget de NPR provient de subsides fédéraux. Le reste provient de sponsors privés et des recettes des stations étatiques qui s’abonnent à ses programmes. Le Congrès ne pourrait donc pas tuer NPR même s’il le voulait. Il est de toute manière peu probable que le Sénat, conservateur mais de courte majorité démocrate, suive la Chambre dans ce vote.
Que faut-il conclure de la controverse ?
1) En Amérique, comme dans d’autres pays, une intellingensia auto-proclamée pense sincèrement que la gauche a toujours raison et que lorsque le peuple ne lui donne pas raison, c’est que le peuple se trompe. Pour autant la tradition américaine s’accorde mal de l’idée que l’argent public doit servir à payer des journalistes plus libres et plus éclairés que les autres pour sauver l’opinion de l’erreur tragique où les conduirait autrement la libre concurrence des médias.
2) À mon sens NPR a eu tort de lancer une campagne affirmant que de méchants républicains voulaient les priver d’antenne.
NPR est une organisation remarquable qui serait encore plus remarquable si elle reconnaissait qu’elle doit combattre ses préjugés “progressistes”. Le ton “politiquement correct” de NPR est tout aussi agaçant. Je le supporte cependant car la qualité de la programmation reste incontestable.
3) Il faut sauver NPR. Pour ce, NPR aurait tout intérêt à s’affranchir entièrement de crédits fédéraux. Les contributions d’entreprises privées, d’auditeurs, d’universités et d’États lui suffiraient largement. 27 millions d’auditeurs méritent que ces programmes de qualité continuent de faire concurrence à l’offre immense d’information et de programmation culturelle dont dispose l’Amérique.
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