Sur le site Internet de la Maison Blanche, un onglet renvoie aux scripts des press briefings. C’est une tradition vieille comme la démocratie américaine : chaque jour, le porte-parole du président, un conseiller, voire le président lui-même, se prêtent au jeu des questions-réponses avec les journalistes accrédités. Tout ce qui se dit dans cette salle de presse est “on”, susceptible d’être immédiatement répercuté au public. Chaque mot est mis en ligne de manière à ce que les internautes du monde entier puissent en prendre connaissance. Deux fois par jour, le même exercice de questionnement a lieu au Royaume-Uni avec les journalistes accrédités au “10 Downing Street”.
Rien de tel en France, explique notre consoeur du Monde chargée des questions diplomatiques, Natalie Nougayrède, dans l’émission de décryptage des médias “Arrêt sur images”, diffusée sur le site Internet du même nom et animée par Daniel Schneidermann. Ainsi, explique-t-elle, durant le conflit libyen, alors même que la France y joue un rôle important, les journalistes n’ont accès qu’à des points de presse techniques au Quai d’Orsay et au ministère de la défense. Le poste de porte-parole de la présidence de la République ayant été supprimé en 2008, il est impossible de recueillir “on”, à chaud, le moindre commentaire politique sur l’action en cours. La semaine dernière, lors du briefing du Quai d’Orsay, un journaliste posait une question sur le point – essentiel – de savoir qui commande cette opération militaire. Il obtint cette réponse : “Nous y travaillons activement avec nos partenaires.” Circulez, y a rien à voir !
Allez sur le site de la Maison Blanche. Vous constaterez que le porte-parole, Jay Carney, doit faire face, chaque jour, à un véritable bombardement de questions. “Il est important, explique Natalie Nougayrède, que le pouvoir soit considéré comme comptable de la parole qu’il prononce, et tenu de s’expliquer sur les décisions qu’il annonce.”
Présent lui aussi sur le plateau d'”Arrêt sur images”, David Pujadas y voit une “différence de mentalité, de culture, entre les pays, et même un autre rapport à la vérité et au mensonge”. Est-ce que cela signifie qu’en France “les politiques baratinent ?”, demande Daniel Schneidermann. “Non seulement ils baratinent, répond le présentateur du “20 heures” de France 2, mais un politique qui ment, en France, ce n’est pas considéré comme gravissime. Alors qu’aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, c’est inenvisageable.”
“Il y a en France une tradition de non-communication, ajoute Philippe Chaffanjon, directeur de France Info. Demandez aux correspondants étrangers en poste à Paris. Ils sont hallucinés par la manière dont tout cela fonctionne.”
Reste alors le “off” pour débusquer ce qui se cache derrière la langue de bois des porte-parole. Quand il y en a…
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