Quand Strauss-Kahn tape sur les doigts d’Obama
Le message de Dominique Strauss-Kahn est simple : les Etats-Unis vont dans le mur. Ce n’est pas dit comme ça, on est dans la diplomatie politico-financière, avec une épaisse langue de bois. Mais le FMI, que dirige DSK, dit dans deux études publiées hier que ça ne peut pas durer : les Etats-Unis est le seul grand pays avancé où le déficit budgétaire augmente cette année. Et en 2011, les emprunts pour financer à la fois le déficit public et le remboursement des dettes publiques qui viennent à échéance cette année vont atteindre 29% du PIB, deux fois
plus que les pays européens à problème.
Le problème est bien connu : les Américains ont fait un choix opposé au nôtre. En Europe, deux ans après la crise, nous avons décidé de diminuer les déficits budgétaires, de faire rentrer les flots de dépenses dans le lit du fleuve. Aux Etats-Unis, c’est l’inverse. L’argent public continue d’inonder le pays, comme le Nil submergeait antan ses rives d’Egypte. Le déficit va ainsi dépasser 10% des richesses produites dans le pays pour la troisième année
consécutive.
C’est un trou deux fois plus profond que dans la zone euro. Avec cette injection massive d’argent public, l’Amérique roule plus vite que l’Europe. Mais comme son carburant est de la dette publique, il risque de se passer la même chose qu’avec son carburant précédent, la dette
privée : à un moment, le moteur casse.
Les Américains sont conscients du problème. Certes, ils ont un fantastique atout : ils impriment le dollar, qui est la monnaie du monde. Et leurs obligations du Trésor constituent le placement jugé aujourd’hui le plus sûr au monde. Mais cet atout est aujourd’hui menacé. Les investisseurs s’inquiètent. Et Washington en est tout à fait conscient. Le débat fait donc rage dans la capitale, d’autant plus que le Congrès va devoir voter d’ici le 15 mai le relèvement du plafond
de la dette publique – sinon, l’Etat risque d’être en défaut de paiement.
Hier, le président Barack Obama a proposé de fixer un objectif de réduction cumulée du déficit de 4.000 milliards de dollars sur les douze prochaines années. Un chiffre énorme pour impressionner – la moitié du déficit prévu. Mais ça risque d’être difficile. Au congrès, les Démocrates refusent toute baisse de dépenses. Et les Républicains ne veulent pas entendre parler de hausse fiscale. Ils veulent même réduire le taux le plus élevé de l’impôt sur le revenu
de 35 à 25%, alors qu’il dépasse 40% dans la plupart des pays d’Europe.
Ces folies américaines nous concernent. D’abord, l’Amérique imprime la monnaie du monde, et elle en imprime trop pour financer son maxidéficit. Ca risque donc de déclencher un jour une grosse vague d’inflation qui nous tombera sur la figure. Ensuite, ses obligations publiques constituent la clé de voûte du système financier mondial.
Si un jour cette clé est pourrie, parce que l’Etat américain ne peut plus rembourser, c’est alors tout le système financier mondial qui risque de s’effondrer sans le moindre repère. Comparée à ce scénario, la faillite de Lehman Brothers est une petite histoire de rien du tout.
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