La presse anglaise a révélé que la CIA a monté une fausse campagne de vaccination au Pakistan dans le but de localiser le chef terroriste. Une méthode qui fait bondir Médecins sans frontières.
L’espion était en blanc. Durant la longue traque qui leur a permis de localiser Oussama Ben Laden au Pakistan, les services secrets américains n’ont pas hésité à organiser une fausse campagne de vaccination dans la ville où ils le soupçonnaient de se cacher, a révélé le quotidien britannique Guardian. Ceci dans le but de récolter des empreintes ADN afin d’identifier des membres de la famille du chef terroriste et de confirmer sa présence.
À force d’années passées sur les traces de l’ennemi numéro un, la CIA a fini par le localiser, en suivant un messager jusqu’à la cache du chef terroriste. La résidence en question, située à Abbottabad dans le nord du Pakistan, est immédiatement placée sous surveillance satellite. Mais comment être sûr qu’Oussama Ben Laden s’y trouve bien ? Impossible de pousser trop avant les investigations sur le terrain sans risquer d’être repérés et de faire fuir la cible. Il faut donc ruser.
La CIA dispose de l’empreinte ADN de la sœur de Ben Laden, décédée en 2010 sur le territoire américain. Elle souhaite donc prélever l’ADN des enfants du complexe où le chef terroriste est supposé vivre, pour le comparer et savoir s’il s’agit bien des siens. Encore faut-il trouver un moyen d’obtenir cet ADN. Ce sera sous couverture d’une campagne de vaccination.
«Grave manipulation de l’acte médical»
D’après le Guardian, les Américains, qui veulent organiser une fausse campagne de vaccination mais avec de vrais vaccins pratiqués par un vrai médecin, font alors appel au docteur pakistanais Shakil Afridi. Ils lui fournissent les moyens d’administrer gratuitement des vaccins contre l’hépatite B et l’envoient à Abbottabad, sans lui dire le but réel de l’opération. Une de ses infirmières parviendra à entrer dans la cache de Ben Laden pour y traiter les enfants. L’ADN récolté pourrait donc avoir permis aux Américains de déclencher l’opération dans laquelle le chef terrroriste a été tué.
La CIA dément officiellement avoir mené une telle opération. Mais selon le Guardian, le docteur Shakil Afridi a été arrêté par les services secrets pakistanais, furieux d’avoir été mis à l’écart par leurs homologues américains dans l’assaut final contre Ben Laden. Les États-Unis presseraient Islamabad de le libérer.
Mais surtout, l’affaire n’a pas plu aux professionnels de la vaccination que sont Médecins sans frontières. Jeudi, l’organisation a publié un communiqué dans lequel elle dénonce le procédé, en soulevant deux objections. D’abord, il apparaîtrait que le docteur pakistanais n’a pas mené à bien sa mission de vaccination. L’hépatite B nécessite en effet une première injection, puis un rappel un mois après. Or le médecin n’est pas retourné dans certains des quartiers où il était intervenu. Deuxième conséquence potentiellement néfaste de ce que MSF appelle une «grave manipulation de l’acte médical» : éventée, elle pourrait desservir la cause des humanitaires sur place, au sein d’une population déjà méfiante à l’égard des Occidentaux en général.
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