Edited by Mark DeLucas
La dette, partout
Après la tension maximale de ces dernières semaines sur la crise de la dette en zone euro, les regards se sont soudain portés ce week-end sur la situation américaine. A huit jours de l’échéance cruciale du 2 août, un Barack Obama énervé (ce qui est rare) a tapé du poing sur la table pour mettre les républicains devant leurs responsabilités et éviter un défaut de paiement partiel de la première puissance économique mondiale sur les remboursements de ses échéances. La Maison-Blanche, qui a convoqué d’urgence une nouvelle réunion hier – non achevée à l’heure où ces lignes ont été écrites -, espérait un accord avant l’ouverture des Bourses asiatiques ce lundi matin. John Boehner, le président républicain de la Chambre des représentants, assurait que telle était aussi son intention -et pas seulement pour relever le plafond de 14.300 milliards de dollars. Mais rien n’était sûr et l’hypothèse d’un tour pour rien ne pouvait être écartée. Si chacun, aux Etats-Unis et ailleurs, sait bien que c’est la première manche de l’élection présidentielle de 2012 qui se joue là, les conséquences d’un échec définitif seraient toutefois telles qu’il est difficile à envisager.
Le plus surprenant, vu d’Europe, est l’attitude des investisseurs à l’égard de ce risque américain. Alors que la moindre hésitation du Vieux Continent fait flamber les taux d’intérêt et plonger les marchés boursiers, la perspective d’un défaut de l’Oncle Sam ne leur a, jusqu’à maintenant, fait ni chaud ni froid. Cela défie l’entendement. OutreAtlantique, le déficit public dépasse les 10 % du PIB, plus du double de ce qu’il est en moyenne dans la zone euro. Le stock de dette y est supérieur, et la balance des paiements est dramatiquement déséquilibrée, alors qu’ici, elle ne l’est pas. La Grèce affole, pas la Californie. L’explication est-elle politique ? Les compromis sont pourtant aussi difficiles à trouver à Washington qu’à Bruxelles. En réalité, la raison n’est pas seulement à chercher du côté du fédéralisme fiscal américain ou du statut monétaire et économique des Etats-Unis. En dépit des faits, il existe un « biais » optimiste sur l’Amérique, comme il existe un « biais » pessimiste sur l’Europe. La croissance par tête et les créations d’emplois ont beau être plus élevées de ce côté de l’Atlantique que de l’autre, personne ne le sait. La leçon est claire : la zone euro inquiétera tant qu’elle n’aura pas de pilotage cohérent et compréhensible.
L’autre enseignement de ce télescopage des calendriers européen et américain en ce mois de juillet 2011 est que la question de la dette va obnubiler longtemps les responsables politiques et les opinions. Un problème qui paraissait autrefois cantonné, pour aller vite, au Japon et à l’Italie devient prioritaire partout. Cela contraste avec la situation florissante des grandes entreprises, comme en témoignent encore les résultats de Microsoft et General Electric publiés avant le week-end. Le fameux « retour de l’Etat » post-crise aura partout le même goût amère : économies dans les dépenses, hausses des impôts ou inflation.
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