Do the Rich Pay Their Fair Share?

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Les riches paient-ils leur juste part ?

Le débat est relancé : au moment où tant de gouvernements écrivent leurs budgets à l’encre rouge, les riches fournissent-ils leur part de l’assiette fiscale ?

La question a d’abord surgi aux États-Unis, où deux camps ont monopolisé une partie de l’été sur la question du relèvement du plafond de la dette américaine : si le débat a été si long et acrimonieux, c’est que la droite américaine se refusait à considérer l’imposition de toute nouvelle taxe et voulait forcer le président Barack Obama à nécessairement réduire les dépenses sociales des États-Unis.

Le président a reçu l’aide d’un allié inattendu en Warren Buffett, le multi-milliardaire qui dispute avec son partenaire de bridge Bill Gates le titre d’homme le plus riche du pays, sinon du monde. Il a été transparent en révélant sa facture de taxes de 2010 (presque 7 millions $ US) sur des revenus imposables de 40 millions $ US. Un taux de taxation de 17,4 %, a-t-il précisé, « moins que les 20 autres personnes de son bureau », qui ont dû verser entre 33 et 41 % de leurs chèques de paie.

M. Buffett a conclu qu’il avait suffisamment bénéficié des largesses publiques de son gouvernement et qu’il n’était nullement contre l’idée d’augmenter son fardeau fiscal.

Dans le sillon, 16 des plus grandes fortunes de la France l’ont imité. Ils ont laissé savoir au gouvernement de Nicolas Sarkozy qu’ils étaient prêts à faire leur part. Mais elles étaient plus nuancées : elles ont fait savoir qu’il s’agirait là « d’une contribution exceptionnelle ». Lisez là qu’elles étaient prêtes à payer un an ou deux, pour donner l’exemple, mais pas de façon éternelle. Et que le montant à verser devait être « raisonnable ».

Le gouvernement français étudie depuis plusieurs mois divers scénarios qui mèneraient à une contribution accrue de peut-être 10 000 $ par quelque 30 000 « ultra-riches » (plus de 700 000 $ de revenus nets par an)… Des « pinottes » ont qualifié certains, « un symbole important », ont clamé les autres.

Ailleurs aussi, les pays veulent mettre davantage à contribution les citoyens plus aisés. En Italie, en Grèce, notamment. Il y en a même qui tentent de ramener sur la table la question d’un taux de taxation unique (flat tax) qui impose un même pourcentage à tous les contribuables, riches et pauvres. Les militants anti-pauvreté s’y attaquent toujours avec vigueur : pour eux, un gagne-petit à 20 000 $ est proportionnellement plus affecté par une facture d’impôt de 2000 $ (en présumant un taux de 10 %) qu’un riche professionnel qui déclare 200 000 $ de revenus… et doit payer 20 000 $ à l’État.

Au Canada, le débat est bien tranquille. Il y a bien, chaque printemps, un appel de la droite pour un taux unique, ce qui simplifierait les rapports d’impôts et mettrait la plupart des 45 000 employés de l’Agence de revenu du Canada au chômage. Le seul qui aborde de temps en temps la question publiquement est le Beauceron Maxime Bernier, de la frange libertarienne du Parti conservateur du Canada.

Alors, les riches paient-ils leur juste part ? De façon assez nette, les Canadiens ne semblent pas le croire. Ils sont convaincus que la classe moyenne porte un trop large fardeau fiscal, entre les pauvres qui bénéficient des largesses de programmes sociaux et les riches qui profitent d’échappatoires fiscaux qui mettent une part de leurs revenus à l’abri des regards de l’État.

L’appel de Warren Buffett est significatif : non seulement est-il temps pour lui et ses riches amis de payer davantage, mais il a déboulonné au passage l’un des arguments-clés des apôtres des impôts toujours plus bas, dont les conservateurs canadiens font partie : garder les impôts bas favorise le réinvestissement des sommes épargnées qui font rouler l’économie, ce qui profite à tous (trickle-down economics). C’est de la foutaise, dit M. Buffett.

Relever le taux d’imposition des plus riches ne ferait pas de tort, mais la mesure s’applique probablement davantage aux États-Unis qu’au Canada. Chez nous, ce sont davantage les nombreux échappatoires fiscaux qui semblent faire problème. C’est plus à ce chapitre que le gouvernement devrait s’appliquer. Ça ne réglerait pas le déficit, mais ça donnerait aux Canadiens l’impression qu’il y a un peu plus de justice en ce bas monde…

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