Ultime recours de Troy Davis avant son exécution
Chantal Valery
Agence France-Presse
Atlanta
La défense de l’Américain Troy Davis, devenu un symbole du combat contre la peine de mort, a présenté mercredi un ultime recours contre son exécution prévue dans la soirée, malgré des doutes sur sa culpabilité et une intense mobilisation internationale.
Troy Davis «demande respectueusement que ce tribunal accorde un sursis à l’exécution de sa peine de mort», indique un document de justice dont l’AFP s’est procuré copie et qui cite le tribunal de l’État de Géorgie où la requête a été déposée.
Condamné à mort en 1991 pour le meurtre d’un policier blanc, Troy Davis, 42 ans, doit se voir administrer l’injection mortelle à 19h au pénitencier de Jackson, en présence de la veuve et des enfants de la victime.
M. Davis «récuse la constitutionnalité de sa condamnation à la peine de mort en se fondant sur de nouvelles preuves», ajoute le document remis à la justice par Me Brian Kammer, citant notamment «un faux témoignage» du médecin légiste qui a autopsié le corps du policier décédé.
La justice américaine a refusé mardi de gracier Troy Davis, qui s’est adressé par écrit à ses partisans depuis le couloir de la mort où il se trouve depuis 20 ans, affirmant que «le combat pour la justice» ne s’arrêtait pas avec lui.
«Le combat pour la justice ne s’arrête pas avec moi. Ce combat est pour tous les Troy Davis avant moi et tous ceux qui viendront après moi», a écrit le détenu -qui a toujours clamé son innocence- dans un message diffusé par la branche américaine d’Amnesty International sur sa page Facebook.
Mardi, le comité des grâces de Géorgie a indiqué avoir «refusé sa clémence».
La réunion de ce comité à Atlanta, capitale de l’État, était considérée comme la dernière chance pour le condamné de voir sa peine de mort commuée en prison à vie, d’éventuels recours auprès de juridictions locales ou de la Cour suprême n’ayant, selon des experts, que d’infimes chances d’aboutir.
Troy Davis a déjà échappé à trois exécutions grâce à de multiples recours judiciaires.
La décision du comité des grâces a déclenché une avalanche de critiques, à la mesure du soutien international dont il bénéficie.
Présenté par ses partisans comme le stéréotype du Noir condamné à tort, Davis jouit de l’appui d’éminentes personnalités comme l’ancien président américain Jimmy Carter, le pape Benoît XVI ou l’actrice Susan Sarandon et des centaines de manifestations de soutien ont eu lieu dans le monde.
La France a appelé mercredi le procureur et les autorités de Géorgie à ne pas l’exécuter. «En exécutant un condamné sur la culpabilité duquel pèsent des doutes sérieux», ces autorités «commettraient une faute irréparable», selon le ministère des Affaires étrangères.
Le Mouvement français contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) a aussi exprimé son indignation, appelant à se joindre au rassemblement organisé par Amnesty International à Paris.
La puissante organisation américaine de défense des droits civils ACLU a appelé à «une grève générale des personnels pénitentiaires en Géorgie».
Le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, a aussi appelé les États-Unis à «épargner la vie» de Troy Davis. «La raison n’est pas seulement notre désapprobation concernant la peine capitale, mais avant tout les doutes sérieux qui persistent sur l’intégrité de la condamnation».
La mère de Mark MacPhail, le policier tué en 1989 dans la ville de Savannah, s’est en revanche félicitée de la décision mardi du comité des grâces. «C’est ce que nous voulions», a déclaré Anneliese MacPhail sur la chaîne CNN.
Lors du procès, neuf témoins ont désigné Troy Davis comme l’auteur du coup de feu mais l’arme du crime n’a jamais été retrouvée et aucune empreinte digitale ou ADN n’a été relevée. Depuis, sept témoins se sont rétractés.
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