Ayn Rand, the Dollar Pasionaria

<--

Ayn Rand, la pasionaria du dollar

Les RAISONS d’un SUCCES. Paru en 1957 aux États-Unis, et vendu à plus de 10 millions d’exemplaires, «la Grève», le péplum libéral d’Ayn Rand, est enfin traduit en français.

C’est vrai qu’elle est interminable cette grève! Plus de 1000 pages… Et pourtant, quel succès. Plus de 10 millions d’exemplaires vendus dans le monde pour cet «Atlas Shrugged», devenu en français «la Grève». Un véritable péplum à la gloire du libéralisme et de l’individualisme signé par une femme timbrée en 1999 par l’US Post Office mais dont on sait peu de chose.

Ayn Rand (1905-1982) s’appelle Alisa Rosenbaum. Elevée dans une famille de la petite bourgeoisie juive de Saint-Pétersbourg, elle fuit la Russie soviétique et s’installe aux Etats-Unis en 1926. A New York d’abord, à Hollywood ensuite, où elle devient scénariste, puis auteur de pièces de théâtre dont «Coupable ou non coupable», monté par Robert Hossein il y a dix ans.

Elle devient alors Ayn Rand et publie deux immenses best-sellers, «The Fountainhead»(1943), traduit en 1981 chez Plon sous le titre «la Source vive», et «Atlas Shrugged»(1957), qui s’ouvre sur la fameuse phrase: «Qui est John Galt?»

John Galt, c’est le personnage principal de cette fresque écrite sous amphétamines qui navigue entre la science-fiction, le feuilleton et le programme politique. Sur une terre qui ne compte plus que des «démocraties populaires», John Galt est un rebelle qui ne veut plus d’une Amérique trop étatique. Il appelle donc les citoyens à «entrer en grève» pour «stopper le moteur du monde» et redémarrer sur de solides bases libérales.

Après pas mal de péripéties, d’inventions loufoques et de déboires sentimentaux, le nouveau ciel espéré survient. «Il leva la main et, dans l’air, au-dessus d’une terre dévastée, il traça le signe du dollar.»

Dans l’essai qu’il consacre à Ayn Rand, Alain Laurent lève le voile sur cet auteur étrange qui débarque en France un bon demi-siècle après avoir été publié outre-Atlantique. On comprend mieux pourquoi l’auteur de ce succès planétaire n’avait pas encore été traduit au pays de Colbert.

La philosophie qui sous-tend «la Grève» ferait passer Nietzsche pour un collectiviste. Ayn Rand ne jure que par l’égoïsme, le capitalisme et la rationalité existentielle, qu’elle agglomère sous le nom d’«objectivisme». A côté d’elle, Alan Greenspan, l’ancien patron de la Réserve fédérale américaine – qui compte parmi ses fans -, ferait presque figure de marxiste.

Curieusement, «la Grève» paraît ici alors que le vent économique a tourné sous l’effet de la crise, même si le «Who is John Galt?» reste aux Etats-Unis une sorte de sésame pour les militants des Tea Party. En France, on ne s’était jamais vraiment demandé: «Who is Ayn Rand?» Mais on peut désormais répondre à la question…

Laurent Lemire

About this publication