Nucléaire, sanctions, espionnage: la guerre froide s’intensifie entre Téhéran et Washington.
Après le brusque accès de tension de ces dernières semaines lié aux menaces iraniennes de fermer le détroit d’Ormuz si l’Occident adoptait de nouvelles mesures contre le pétrole vendu par Téhéran, la justice révolutionnaire de la République islamique a franchi un nouveau pas encondamnant à mort lundi un Américano-Iranien.
Ancien marine de 28 ans né aux États-Unis d’une famille iranienne, Amir Mirzaï Hekmati a été «reconnu coupable de collaboration avec un pays hostile et espionnage pour la CIA», selon l’agence iranienne Fars. La justice l’a également déclaré «moharab», c’est-à-dire «en guerre contre Dieu», ce qui le rend, là encore, passible de la peine capitale. Est-ce une réponse aux déclarations du secrétaire d’État à la Défense, Leon Panetta, qui, au cours du week-end, prévenait l’Iran qu’une tentative de fermer le détroit d’Ormuz – par où transite un tiers du pétrole mondial – serait considérée comme «une ligne rouge» à ne pas franchir.
Alors que les États-Unis et l’Union européenne s’activent pour sanctionner le pétrole iranien (70% des recettes d’exportation), Téhéran multiplie les menaces de bloquer ce goulet stratégique pour l’écoulement de l’or noir, donc pour l’économie mondiale. Et pour alimenter encore la tension, l’Iran a choisi de replacer le dossier nucléaire au centre de son différend avec les Occidentaux. Lundi, à Vienne, des sources diplomatiques proches de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA) confirmaient que Téhéran avait bien commencé d’enrichir de l’uranium sur un nouveau site souterrain, très bien protégé contre d’éventuelles frappes aériennes. Dimanche, le patron de l’agence iranienne à l’énergie atomique, Fereidoun Abbasi, cible d’un mystérieux attentat en 2010, avait laissé entendre que son pays était sur le point d’activer le site de Fordow, près de la ville sainte de Qom. Une annonce qui place Israël et les États-Unis devant un choix difficile. En effet, cette installation est profondément enterrée sous la montagne, donc difficilement atteignable par des bombes même ultrapuissantes, qui devraient également faire face à un système de défense aérien sophistiqué autour du site. Selon Abbasi, cet emplacement, récemment inspecté par les experts de l’AIEA, est équipé d’une nouvelle génération de centrifugeuses, permettant d’accélérer la vitesse d’enrichissement de l’uranium.
Le Mossad actif au Kurdistan
L’Iran aurait déjà produit suffisamment de combustible pour équiper quatre ogives. Mais encore faudrait-il que ce combustible transite par les nouvelles centrifugeuses de Fordow. Or nul ne sait si Téhéran a pris une telle décision, lourde de conséquences. En tout cas, pour les États-Unis, la priorité ne semble plus de stopper une quelconque capacité nucléaire iranienne, mais plutôt d’arrêter la fabrication d’une arme atomique. «Sont-ils en train de développer une arme nucléaire?» s’est demandé Leon Panetta dans l’émission «Face à la nation» sur CBS. «Non. Mais nous savons qu’ils essaient de développer une capacité nucléaire. Cela nous préoccupe. (Mais) notre ligne rouge, c’est que l’Iran ne développe pas l’arme nucléaire», a tenu à souligner Panetta, qui s’exprimait après le responsable nucléaire iranien. Toujours au cours du week-end, Téhéran a annoncé l’arrestation d’un nombre «indéterminé d’espions» qui travailleraient pour Washington. Vraie ou fausse accusation?
Toujours est-il que les États-Unis et Israël ont multiplié les actions de sabotage contre des installations nucléaires sensibles, tout en téléguidant des assassinats ciblés d’experts nucléaires iraniens. «Le Mossad utilise pour cela la région autonome du Kurdistan irakien, où ses agents ont renforcé leurs infiltrations», affirme une source sécuritaire à Bagdad. «Les Israéliens, ajoute-t-elle, utilisent les opposants kurdes au régime iranien qui sont réfugiés dans les régions kurdes d’Irak.»
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