Quelle mouche a piqué Mitt Romney et son contingent de conseillers? Celle de la crédulité, de la gaffe, voire de la bêtise? Parce que… indiquer le matin du jour qui se conclut par le discours sur l’état de l’Union décliné par son principal adversaire que l’on a payé 15 % d’impôts sur des revenus qui se conjuguent avec les millions, revenait à offrir des tonnes de cartouches, gratuitement c’est à noter, à l’adversaire en question.
On imagine aisément que dans la matinée de mardi, les éclats de rire ont dû résonner dans tous les coins et recoins de la Maison-Blanche lorsque du président au petit personnel, tout un chacun a appris que Romney avait engrangé des revenus totalisant 45 millions en deux ans grâce à un déboursé minimum d’impôts couplé aux rendements de comptes ouverts en Suisse, aux îles Caïmans et aux Bermudes. La nouvelle a d’autant plus fait désordre qu’elle a mis en relief comme jamais, depuis l’amorce des primaires du Parti républicain, que Romney a ajouté cette masse de millions en tirant profit de son passé, pas si lointain, de patron de Bain Capital, un fonds spéculatif qui a dépecé, entre autres choses, des entreprises américaines. Un fonds qui a favorisé la délocalisation d’emplois.
Il n’en fallait évidemment pas moins pour qu’Obama et son équipe s’emparent de cette occasion en or 24 carats en visant Romney, à travers l’exposé sur l’état de la nation, sans jamais le nommer. Toujours est-il que le chef de l’exécutif veut une réforme de la fiscalité logeant à l’enseigne de la règle édictée par le milliardaire Warren Buffett: le taux d’imposition minimum doit être de 30 % à partir d’un revenu totalisant 1 million. «Il est normal que le patron paye plus d’impôt que sa secrétaire.» Alors que ce n’est pas du tout le cas actuellement. Quant aux déductions fiscales, Obama a proposé d’en réduire le nombre afin de mettre un terme aux conséquences tétanisantes qu’elles ont sur l’impôt sur le revenu.
Romney avait avancé qu’il aurait mieux valu qu’on laisse GM et Chrysler faire faillite? Obama s’est félicité que les prêts accordés par l’État ont permis la renaissance de l’industrie automobile. Romney veut encore et toujours libéraliser davantage Wall Street? Obama veut tout le contraire pour la bonne et simple raison que le laisser-aller échevelé de son prédécesseur, Bush fils évidemment, a mis l’économie du pays sur le carreau. Romney a présidé à la délocalisation d’un certain nombre d’emplois? Obama entend mettre un terme aux déductions fiscales des entreprises qui délocalisent pour mieux accorder des crédits à celles qui rapatrient les emplois en question.
On fait l’impasse sur le reste pour mieux s’attarder à la gaffe stratégique de Romney. Il est écrit dans le ciel que lorsque Newt Gingrich a exigé la publication de la feuille d’impôts de Romney, il y a de cela trois semaines, ce dernier était condamné à le faire. Plutôt que de crever l’abcès immédiatement, il a tardé, il a chipoté. Ce faisant, il a ouvert la porte à la rumeur, il a instillé le doute. Pire, il n’a rien trouvé de mieux que rendre ces documents publics le matin, et non le lendemain ou le surlendemain, du discours d’Obama.
En agissant de la sorte, Romney a permis au président d’effectuer une mise en relief claire et nette des tares qui perforent la santé économique des États-Unis. Pour s’en convaincre, il suffit de voir et revoir les mines basses des républicains écoutant Obama. Quoi d’autre? Contrairement à l’an dernier, les interruptions de ces derniers furent très timides. Point.
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