The United States and Africa: the Force of Great Programs

Edited by Laurence Bouvard

 

 

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États-Unis – Afrique : la force des grands programmes

Grâce à des mesures de soutien très ciblées, l’Agoa et le Millennium Challenge Corporation doivent servir les échanges entre les États-Unis et le continent. La nécessité étant de renforcer le fragile secteur productif africain.

En Afrique, l’aide américaine au développement a considérablement augmenté. Entre 2006 et 2009, elle est passée de 2,1 milliards à 8,2 milliards de dollars (de 1,6 milliard à 5,7 milliards d’euros). Toutefois, crise financière mondiale oblige, elle a enregistré un tassement en 2010, à 8,1 milliards de dollars, et une nette baisse en 2011, à 6,9 milliards de dollars. Cette situation complique la réalisation des grands objectifs américains sur le continent, à savoir la lutte contre les épidémies (paludisme et virus du sida), qui représente environ 50 % de l’aide globale américaine, le combat contre le changement climatique et les efforts pour la sécurité alimentaire liés à la nouvelle initiative de l’administration Obama, Feed the Future.

Un domaine stratégique a néanmoins été épargné par les coupes budgétaires, celui de la coopération économique et de l’aide au développement du secteur privé africain. Découlant du principe « le commerce plutôt que l’aide », cette politique a connu une évolution remarquable ces dix dernières années.

Premier pas, le lancement en 2000 de l’African Growth and Opportunity Act (Agoa, loi sur la croissance et les opportunités économiques en Afrique). Pierre angulaire des relations économiques entre les États-Unis et le continent, il supprime les droits de douane sur plus de 6 400 produits en provenance de pays africains éligibles, c’est-à-dire adhérant aux règles de bonne gouvernance.

Quarante pays subsahariens en bénéficient aujourd’hui, l’administration Obama ayant rétabli le Niger, la Guinée et la Côte d’Ivoire en octobre 2011. L’Agoa est un succès relatif. Point positif, le volume global des échanges entre les États-Unis et l’Afrique subsaharienne est passé de 27 milliards de dollars en 2001 à 95 milliards en 2011 (91 milliards pour les pays de l’Agoa).

Reste que les produits pétroliers représentaient en 2011 plus de 90 % des 74,2 milliards de dollars d’importations africaines aux États-Unis, proportion à peu près constante sur la décennie. Quant aux 21 milliards de dollars d’exportations américaines vers l’Afrique (machines-outils, véhicules…), ils se concentrent sur quatre marchés : l’Afrique du Sud, le Nigeria, le Ghana et l’Angola. De fait, l’Agoa n’a pas freiné l’essor de la Chine, qui est devenue, en 2008, le premier partenaire commercial de l’Afrique.

Bisbilles

De l’avis de tous les acteurs concernés, l’urgence aujourd’hui est de renforcer le secteur productif africain, afin de diversifier les exportations du continent aux États-Unis. Ce sera notamment l’objet du 11e forum Agoa, qui se tient les 14 et 15 juin à Washington. Avec un dossier urgent en suspens : la disposition sur l’ouverture du marché américain aux fabricants de vêtements africains utilisant des matières premières en provenance d’autres pays. Expirant le 30 septembre 2012, la prorogation par le Congrès de cette disposition est loin d’être acquise, en raison de bisbilles entre républicains et démocrates.

Selon les estimations, 300 000 emplois seraient menacés en Afrique. D’après l’African Coalition for Trade, qui représente les exportateurs de neuf pays Agoa, les fabricants de textile africains auraient déjà perdu 35 % de leurs commandes au profit de concurrents asiatiques. Mais une autre menace plane, celle de l’extension du principe de l’Agoa – qui expire en 2015 – à l’ensemble des pays les moins développés, y compris asiatiques, très compétitifs sur le marché du textile.

Également essentiel dans la politique de coopération économique entre les États-Unis et l’Afrique, le Millennium Challenge Corporation (MCC) existe depuis 2004. Cette agence est dotée d’un budget annuel de près de 1 milliard de dollars. Elle a pour mission de réduire la pauvreté dans le monde par la promotion de la croissance économique. À cette fin, le MCC met des sommes importantes à la disposition de pays triés sur le volet, pour une période de cinq années, en fonction de dix-sept indicateurs qui vont du niveau de liberté à la bonne gouvernance politique et économique, en passant par l’ampleur de la corruption. Le MCC a récemment suspendu ses opérations avec le Mali et le Malawi.

Efficacité

Autre particularité, les États doivent présenter leurs propres projets d’investissement, rigoureusement évalués par le MCC. Aujourd’hui, onze nations subsahariennes bénéficient de ces programmes (dits compacts) qui servent en général au renforcement de leurs infrastructures (aéroport de Bamako, port de Cotonou…). À titre d’exemple, le Ghana reçoit 547 millions de dollars sur cinq ans, dont une partie servira à la rénovation de son réseau autoroutier.

Selon Todd Moss, du Center for Global Development, think-tank basé à Washington, la création du MCC a « profondément rénové les débats sur l’efficacité de l’aide au développement. C’est devenu un modèle ». Mais « on ne coopère qu’avec les pays qui ont les meilleurs indicateurs », ajoute-t-il. S’appuyant sur l’approche du MCC – sélectivité, transparence, appropriation nationale -, l’administration Obama a récemment lancé le Partnership for Growth, une initiative qui accroît la coopération économique avec quatre pays, dont deux africains : les habituels bons élèves que sont le Ghana et la Tanzanie.

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