Paul Ryan, the Budget-Bucker

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Paul Ryan, le tronçonneur du budget

Paul Ryan ! C’est le choix de Mitt Romney pour la vice-présidence, d’après les media américains. Un jeune loup du budget, adulé par le Tea Party. (Et par ailleurs catholique, ce qui fait de l’équipe Romney-Ryan, le premier “ticket” sans aucun protestant).

Paul Ryan a les oreilles un peu décollées, un air de Dany Boon faussement niais. Mais derrière le regard clair, il ne craint pas de manier la tronçonneuse. Paul Ryan est connu pour vouloir tailler tout ce qui dépasse. Les retraites, les aides sociales, les subventions agricoles, l’assurance santé pour les personnes âgées. Avec ce choix, Mitt Romney porte le combat sur les faiblesses de Barack Obama: la lutte contre les déficits.

L’an dernier, quand Paul Ryan a présenté le projet de budget du parti républicain pour 2012, la classe politico-médiatique s’est arrêtée de respirer. « Personne n’avait anticipé un plan aussi radical », a témoigné un commentateur. « Est-ce que ce n’est pas un peu kamikaze ? », a interrogé un reporter. L’intéressé en est convenu bien volontiers. « Ce n’est pas un budget, a-t-il répondu. C’est une cause. » Paul Ryan a développé une réputation de crâne d’oeuf et même Barack Obama a l’air de le considérer comme un quasi-alter ego en technocratie budgétaire.

A 42 ans, Paul Ryan est le président de la commission des affaires budgétaires de la Chambre des représentants, ce qui n’est pas un mince exploit quand on sait que les présidences s’acquièrent à la force de l’ancienneté. Avec son look de jeune premier gominé, il réussit à avoir l’air antisystème alors qu’il est arrivé en 1998 à la Chambre. Il en appelle aux jeunes qui sont « des libertariens par nature » en espérant qu’ils vont l’aider à relever le défi du financement des retraites.

En même temps que son budget, Paul Ryan a diffusé une vidéo choc, façon Al Gore, sur la catastrophe budgétaire qui attend l’Amérique. Il s’y montre en miniature à côté de graphiques affolants. Ecrasé par la dette (14 000 milliards de dollars, soit environ 10 000 milliards d’euros), mais il est en manches de chemise et s’attaque vaillamment au déficit. « J’adore les présentations PowerPoints », a-t-il confié au New York Times.

Dans sa circonscription du Wisconsin, il montre des images d’émeutes en Grèce. Suit l’angoissante question : « Allons-nous attendre d’en arriver là » ? Paul Ryan a étudié l’économie à l’université de Miami, dans l’Ohio, où officiaient des disciples de l’Autrichien von Hayek. Il voulait devenir économiste mais il avait peur que ses rapports finissent sur les étagères des bibliothèques universitaires (c’était avant les blogs). Après un premier emploi dans l’entreprise de terrassement fondée par son arrière-grand-père, il a bifurqué vers la politique. Il est élu d’une circonscription qui a voté pour Obama en 2008.

Quand les deux partis se battent autour de quelques milliards de dollars de coupes budgétaires, il jongle avec les « trillions » (1 trillion = 1 000 milliards). Loin des propositions de tailler les subventions à la radio publique NPR et au planning familial, il fait du lourd : suppression de l’assurance-maladie pour les plus de 65 ans (remplacée par une allocation annuelle permettant d’acheter une police d’assurance sur le marché privé), plafonnement de l’aide pour les plus pauvres, réductions dans les crédits pour les transports, l’énergie, les pensions des anciens combattants ; réduction de 10 % du nombre de fonctionnaires…

Au total, le budget Ryan prévoit 6 trillions de coupes budgétaires en dix ans. Il réduit même les impôts… notamment pour les revenus les plus élevés : le taux maximal passerait de 35 % à 25 %. Comme la plupart des républicains, il est persuadé que baisser les impôts crée des emplois. « Je crois en l’approche du libre marché pour apporter la prospérité à ceux qui n’en bénéficient pas », dit-il.

L’establishment républicain avait eu un peu peur de ses excès l’an dernier, et le parti avait préféré ne pas adopter sa « Feuille de route pour le futur », un programme de privatisation partielle de la sécurité sociale. Mais les néoconservateurs avaient salué son «courage » politique.

– « C’est la réforme budgétaire la plus courageuse qu’aucun d’entre nous ait jamais vue», écrivait David Brooks dans le New York Times.

Le « courage » de Paul Ryan avait aussi été salué à gauche, quoique sur un mode plus ironique.

– « C’est vrai qu’il faut un sacré courage pour proposer d’arnaquer 90 % de la population afin de donner des crédits d’impôt aux riches », estimait le chroniqueur Matt Yglesias.

Les « faucons du déficit » estimaient avoir trouvé leur homme. Et rêvaient déjà d’un duel Ryan-Obama.

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