Mitt Romney's High-Risk Winning Formula

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Depuis des semaines, Mitt Romney ramait péniblement contre des vents mauvais. Le candidat républicain à l’élection présidentielle américaine était volontiers soupçonné par sa “base” d’être trop mou pour espérer battre Barack Obama en novembre, et accusé par ses adversaires démocrates d’être trop flou pour prétendre présider au destin de l’Amérique.

En choisissant Paul Ryan comme colistier, il vient de faire un sacré pari. Car s’il y a bien une chose que l’on ne peut reprocher au jeune (42 ans) représentant du Wisconsin au Congrès, c’est d’être mou et flou.

Bien au contraire. Apôtre d’un néolibéralisme radical, pourfendeur de l’assistanat et du Welfare State rooseveltien, M. Ryan a fait de la révolution fiscale l’arme décisive pour résorber la gigantesque dette publique des Etats-Unis et éviter qu’elle n’hypothèque plus longtemps la puissance américaine.

Pour ce faire, il propose un remède de cheval : réduire de 6 000 milliards de dollars la dépense publique en dix ans et, parallèlement, la recette fiscale de 4 000 milliards de dollars, par des baisses d’impôts de grande ampleur, le tout sans réduire les dépenses militaires. Au passage, la couverture santé et les retraites seraient totalement privatisées, y compris pour les plus indigents, et les aides sociales fédérales quasiment abolies. A côté de quoi un Ronald Reagan apparaît, rétrospectivement, comme un dangereux gauchiste. Même dans le camp républicain, beaucoup estiment que le pays ne résisterait pas à une telle purge.

Catholique militant, le représentant du Wisconsin n’est pas moins radical sur le terrain des valeurs, prônant non seulement l’interdiction de l’avortement mais la suppression du financement public du planning familial, et soutenant avec énergie la liberté du port d’armes…

En choisissant ce moine-soldat comme colistier, Mitt Romney espère avoir résolu le dilemme auquel il est confronté : unifier son camp, entraîner à la fois les républicains traditionnels (des conservateurs modérés jusqu’aux reaganiens classiques) et la droite la plus dure qui dicte de plus en plus aux républicains leur agenda politique. En 2008, John McCain avait fait – sans succès – le même pari en choisissant comme colistière Sarah Palin, égérie de la droite populaire et populiste. Avec un Ryan moins baroque et plus charpenté, le candidat républicain tente une martingale similaire.

Mais il prend un double risque. D’une part, celui de s’aliéner les “électeurs indépendants” dont dépend pour beaucoup le sort du scrutin, ainsi que des catégories (retraités et femmes notamment) qui seraient touchées de plein fouet par l’éventuelle mise en œuvre du “plan Ryan”. D’autre part, il donne à l’équipe de Barack Obama un redoutable angle d’attaque : son stratège, David Axelrod, n’a pas tardé à qualifier M. Ryan d'”idéologue d’extrême droite”. Au point de contraindre immédiatement M. Romney à se démarquer du projet économique de son colistier. La campagne américaine menaçait d’être terne. Elle s’annonce désormais musclée.

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