Why Mitt Romney’s Mormonism Will Matter in US Election

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Pourquoi le profil mormon de Mitt Romney va peser sur le scrutin américain

Pour la première fois de leur histoire, les Américains ont l’occasion d’élire un mormon à la Maison Blanche. Cet aspect de la candidature de Mitt Romney n’a pas manqué de susciter la curiosité de la presse. Le “facteur mormon” met en lumière la complexité et l’imbrication des enjeux religieux dans une élection où l’on dissocie, à tort, les questions économiques et morales.

On s’est demandé un temps si la foi du candidat républicain n’allait pas rebuter les indispensables évangéliques conservateurs, qui ne considèrent pas le mormonisme comme une véritable confession chrétienne mais comme une secte. Les protestants conservateurs ainsi que les catholiques sont néanmoins prêts à se reconnaître un certain nombre de valeurs communes avec les mormons : importance de la famille, libéralisme économique, Etat fédéral réduit a minima, puissante projection internationale. En d’autres termes, les évangéliques conservateurs préfèrent voter Romney sans enthousiasme plutôt que s’abstenir et participer indirectement à la réélection d’un Obama qu’ils considèrent comme l’Antéchrist.

La réélection de George W. Bush en 2004, attribuée à la mobilisation des “values voters”, électorat sensible aux questions de moeurs, a généré un intérêt particulier pour la relation privilégiée entre les républicains et cette part de la population américaine. Elle a révélé en miroir l’incapacité des démocrates à s’adresser à cet électorat.

Quatre ans plus tard, la victoire de Barack Obama est rendue possible par un glissement culturel : il plaide pour une réconciliation entre les démocrates et les évangéliques. On (re)découvre alors une gauche religieuse, progressiste, héritière du mouvement pour les droits civiques des années 1960, lui-même descendant du christianisme social (“Social Gospel”), indigné par la misère de l’Amérique industrielle de la fin du XIXe siècle.

De fait, une des forces de la campagne d’Obama a été une mobilisation sans précédent des jeunes, généralement assez abstentionnistes, et notamment de jeunes évangéliques blancs, traditionnellement républicains. A leurs yeux, les questions environnementales ou l’aide au développement en Afrique primaient sur les préventions de la génération précédente contre l’avortement et le mariage homosexuel. Quatre ans plus tard, l’enthousiasme à l’égard de Barack Obama s’est estompé et il semble que le tournant culturel parfois annoncé au sein de l’électorat évangélique en faveur des démocrates n’ait pas eu lieu : 80 % des évangéliques blancs de 18-25 ans comptent voter Romney, essentiellement par hostilité envers Obama.

Cependant, l’existence d’une “gauche évangélique” montre qu’ils ne forment pas un bloc monolithique, ce que l’on constate également chez les catholiques, qui constituent un quart de l’électorat, soit autant que les évangéliques. La double identité politique des catholiques, partagée entre un idéal de justice sociale et de solidarité et le conservatisme social, s’incarne dans le choix des deux colistiers, le démocrate Joe Biden et le républicain Paul Ryan, tous deux catholiques d’origine irlandaise.

Plus que jamais, la victoire passera par une mobilisation sans faille, notamment dans les Etats les plus disputés comme la Floride, l’Ohio et la Virginie, mais aussi dans ceux où les catholiques sont particulièrement nombreux : Pennsylvanie, Wisconsin, Nevada, Colorado et Nouveau-Mexique. Dans les trois derniers, en outre, les populations hispaniques en croissance constante sont devenues un paramètre électoral fondamental. Très majoritairement catholiques, ils sont toutefois gagnés par le protestantisme (22 %), notamment le pentecôtisme.

Même si la précarité de leur situation économique et leur statut d’immigrants ou d’enfants d’immigrants les rend très largement réceptifs aux propositions démocrates, leur conservatisme en matière de moeurs, surtout quand ils sont protestants, peut les pousser à voter républicain. Crise oblige, les questions économiques sont particulièrement saillantes cette année. Cependant, les questions morales restent centrales (avortement, contraception, mariage des homosexuels). Il serait donc illusoire de dissocier ces sujets : en juin, un groupe de religieuses a sillonné le pays en bus pour dénoncer le budget ultralibéral proposé par leur coreligionnaire républicain Paul Ryan, arguant qu'”un budget est un document moral”.

Les républicains essaient enfin de tirer parti du “facteur mormon” pour courtiser à la fois certains grands donateurs juifs orthodoxes et un électorat juif pourtant assez largement acquis au parti démocrate. Du fait de leur passé de minorité persécutée qui a dû traverser un désert pour gagner sa Terre promise de l’Utah au milieu du XIXe siècle, les mormons s’identifient volontiers aux juifs et prônent une politique étrangère résolument pro-Israël. L’électorat juif est certes relativement peu nombreux (à peine 2 % à 3 % du total). Cependant, dans un scrutin que l’on annonce de plus en plus serré, l’important n’est pas de renverser la tendance mais de capter les quelques milliers de suffrages qui peuvent faire la différence dans les Etats-clés, et d’espérer des répercussions nationales de ces succès locaux et ciblés.

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